L'ombre du vent. Carlos RUIZ ZAFON - 2009
Publié le 18 Février 2018
L'ombre du vent
Carlos RUIZ ZAFON
Traduit de l’espagnol par François MASPERO
Le Livre de Poche, septembre 2009
640 pages
Thèmes : Espagne, Amour, Livres, Histoire, mémoire, Transmission, Guerre d’Espagne, Fantastique
J’imagine ne pas être la seule à avoir des livres qui traînent depuis plusieurs mois/années dans sa bibliothèque, et qui, malgré les nombreuses critiques élogieuses lues et entendues ça et là (et pour moi, ici, à commencer par celles de mes sœurs), attendent patiemment LEUR moment pour être lus.
Et lorsqu’on les referme, de se dire : « Mais pourquoi ai-je mis autant de temps à le lire ??! »
Ce roman est de ceux-là !
Les premières pages nous happent.
L’intrigue nous accroche.
La plume de l’auteur nous embarque, nous émeut, nous étreint.
L’Ombre du Vent, premier roman d’une tétralogie, nous parle de livres, de leurs pouvoirs, des lecteurs, des passions qu’ils suscitent, des métiers qui gravitent autour et du contexte de leur parution ; mais aussi de l’Histoire et de l’Amour sous toutes ses formes.
Je me souviens encore de ce petit matin où mon père m’emmena pour l première fois visiter le Cimetière des Livres Oubliés. Nous étions aux premiers jours de l’été 1945, et nous marchions dans les rues d’une Barcelone écrasée sous un ciel de cendre et un soleil fuligineux qui se répandait sur la ville comme une coulée de cuivre liquide.
Le roman débute en 1945, et nous fait voyager, durant 20 ans, dans Barcelone, auprès de Daniel Sempere, orphelin de mère et fils de libraire puis libraire lui-même, au gré de parties datées qui nous racontent une ou plusieurs années qui nous permettent de suivre l'évolution de son caractère, de ses certitudes, de ses responsabilités, de ses rencontres...
Ce premier matin, il est mené par son père au Cimetière des Livres Oubliés, gardé par un certain Isaac.
Dans ce labyrinthe formé par les étagères, il lui dit de choisir un ouvrage.
Daniel parcourt les allées et tombe sur un petit livre au cuir abîmé, L'ombre du vent d’un certain Julian Carax.
Est-ce à cause de cette pensée, ou bien du hasard ou de son proche parent qui se pavane sous le nom de destin, toujours est-il que, tout d’un coup, je sus que j’avais déjà choisi le livre que je devais adopter. Ou peut-être devrais-je dire le livre qui m’avait adopté.
Fasciné, il le dévore et veut tout lire, tout savoir de son auteur.
Son père l'emmène alors voir un ami et collègue, Gustavo Barcelo, qui lui offre de racheter le livre, ce que Daniel refuse comprenant ainsi que Carax se trouve être un homme bien mystérieux...
Et donc intéressant, intriguant.
La nièce de Barcelo, Clara, une beauté diaphane et aveugle, de dix ans son aînée, lui apprend ce qu'elle sait sur ce Carax. En échange, il vient lui faire la lecture ou la conversation.
Daniel est amoureux sans qu'il le sache vraiment lui-même et se sent trahi le jour où il la surprend avec un autre.
Mais grâce à cela, il fait la connaissance avec Fermin Romero de Torres, un mendiant à qui il offre une place d’assistant à la librairie et qui se révèlera être un ami bien précieux, au quotidien comme dans ses recherches sur Carax.
Avec lui, nous remontons la trace et l'histoire de cet auteur maudit, ainsi que celles de la ville, avant-pendant-après la guerre « civile ».
Si le nom de Franco n’est pas inscrit, son régime coercitif est très bien décrit et notamment représenté par l’inspecteur de police Fumero, qui est autant une figure du présent que du passé, comme dans la vie de misère menée par plusieurs protagonistes.
Mon père hocha la tête d’un air sombre et avala sa soupe en silence. C’était un homme réservé qui, même s’il n’en parlait jamais, vivait dans le passé. J’avais grandi dans la conviction que ce long ralenti de l’après-guerre, un monde de monotonie, de misère et de rancœurs cachées, était aussi naturel que l’eau du robinet, et que cette tristesse muette qui suintait des murs de la ville blessée était le véritable visage de sn âme. L’un des pièges de l’enfance est qu’il n’est pas nécessaire de comprendre quelque chose pour le sentir. Et quand la raison devient capable de saisir ce qui se passe autour d’elle, les blessures du cœur sont déjà trop profondes.
Les deux destinées de Julian et Daniel, que 35 ans séparent, suivent le même parcours jusqu'à se croiser, voire presque se confondre.
L'ombre du vent est un magnifique et passionnant roman sur les livres, la vie et l’Amour.
Amour de la famille, amour -passion, amour-amitié, amour des livres, mystère, enquêtes, un brin de fantastique, clins d’œil littéraires, mots choisis, ce roman épais se lit avidement.
Il nous immerge dans les ressentis des personnages, comme dans la Barcelone d’alors, qui se transforme, grâce à des descriptions très visuelles.
La suite n’est pas encore dans ma bibliothèque, mais lorsqu’elle le sera, je n’attendrai pas longtemps avant de m’y plonger !
Ce roman participe au Challenge des Douze Thèmes du Salon des Précieuses, ainsi que pour le "Petit Bac 2018" d'Enna pour ma 3e ligne, catégorie Couleur.
D’autres lectures ou évocations de la Guerre d’Espagne et de ses conséquences, chroniquées ou présentées succinctement sur le blog :
- Roman : Pas pleurer. Lydie Salvayre.
- BD : Jamais je n’aurais 20 ans. Jaime Martin.
- BD : Au fil de l’eau. Juan Diaz Canales.
- BD: Ernesto de Marion Duclos
- BD: Le photographe de Mauthausen. Rubio SALVA, Aintzane LANDA et Pedro J. COLOMBO.
- Roman: Moi, Dora Maar.. Nicole Avril.
- Album: Et Picasso peint Guernica. Alain Serres.
- Album: Guernica. Héliane Bernard et Olivier Charpentier.
Belles lectures et découvertes,
Blandine
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