L'espoir sous nos semelles. Aurore GOMEZ - 2018 (Dès 13 ans)
Publié le 12 Juin 2018
L'espoir sous nos semelles
Aurore GOMEZ
Editions Magnard Jeunesse, avril 2018
336 pages
Dès 13 ans
Thèmes : famille, aventure, estime de soi, quête, amitié, nature, amour
Adélaïde Décembre, 17 ans, surnommée Juno, est à bout et ce qu’il reste de sa famille, aussi.
Sa sœur aînée, Jade, est morte en montagne ; sa mère est décédée dans un accident de voiture ; son père, pêcheur, noie son chagrin dans l'alcool et ne fait plus rien depuis deux ans.
Juno travaille dans l'entreprise du coin, Milicote, mais les placards sont souvent vides et ses trois jeunes frères et sœurs ont souvent faim.
Bref, Juno a beau essayer de porter les siens à bout de bras, elle n'y arrive plus.
C’est en attendant dans l’épicerie qu’une pluie diluvienne cesse qu’elle prend, machinalement, un tract sur le trek du Pownal.
Peu à peu, une idée fait son chemin : et si elle participait à ce trek et si elle le gagnait ?
Bien vite, la récompense financière pour le vainqueur du trek lui apparaît comme l'unique solution à Juno pour sauver sa famille de la misère vers laquelle elle se dirige.
La voilà donc partie pour un mois, sur ce trek en solitaire qui l’oppose à vingt-neuf autres concurrents, tous là pour une bonne raison, en plus de celle de l’argent.
Il se déroule sur une île aux reliefs escarpés et est long de 976 km.
Il emprunte des sentiers de forêts, des crêtes vertigineuses, des ponts suspendus, des rivières tumultueuses, des monts enneigés, des plaines où rôdent des loups...
Les dangers sont multiples, inconnus, angoissants, jusque dans l’eau qu’il faut filtrer.
Les concurrents sont soumis à des règles strictes, ne pouvant s’entraider sous peine de disqualification (sauf pour les binômes), devant rendre chaque jour compte, grâce à leur tablette, de leur progression et état, en postant des messages, des photos, une vidéo.
Car le trek est très suivi, et commenté, sur les réseaux sociaux.
Ingrédients de la journée : Pas de Géant, câble, baudrier, pluie et double dose d’effroi.
A chaque étape du parcours, une borne permet de checker son passage, de retirer des provisions alimentaires, de se décharger d’un équipement qui ne servira plus, de remplacer sa tablette si besoin, de consulter le profil des autres, leur avancée et la sienne, de savoir qui a abandonné…
Il n’est pas interdit de marcher à plusieurs et cela permet à Juno de faire des rencontres aussi formidables que détestables, qui la poussent dans ses retranchements ou l’encouragent.
Les caractères se dessinent, les ambitions se dévoilent.
Mise en face de ses doutes et de ses peurs, confrontée à ses certitudes et souvenirs, elle avance, courageuse et volontaire, faisant fi de la douleur et des multiples sentiments qui l’assaillent, à cause des autres, à cause des commentaires, à cause d’elle-même.
Ce trek est une grande aventure humaine mais est surtout un formidable défi que Juno se lance à elle-même, pour elle-même.
Et nous, lecteurs, cheminons à ses côtés, filtrons l'eau avec elle, redoutons la nuit ou la blessure (tant d’autres en ont eu), aspirons à la pause, au calme, à la solitude ou aux retrouvailles, ressentons le poids du sac trop lourd, les pierres qui roulent sous les pieds perclus d'ampoules, prenons de plein fouet la pluie cinglante, l’appel du vide, la majesté des paysages.
Malgré notre détermination, nous avons beaucoup de mal à abattre plus d’une vingtaine de kilomètres par jour.
Ça monte, ça descend, ça serpente. Il faut enjamber les troncs tombés au sol, gravir les énormes rochers, trouver où traverser à gué les torrents tumultueux ou bouillonnants. Ce ne sont pas les paisibles rivières du plateau Leu , mais des monstres d’eau qui cascadent à vive allure, cherchant à nous faire tomber quand nous tentons de les franchir, s’engouffrant dans nos jambes, projetant de petits galets contre nos chevilles.
Cette conquête de la nature – qui reste toujours si grande, imprévisible, inaccessible- , est surtout une conquête de soi. Elle est emplie de symboles et de métaphores.
Elle nous rend compte de la beauté du geste, de la beauté de l’effort et du chemin de soi, réalisé avec humilité.
Juno apprend à se connaître, à évaluer ses limites, ses aptitudes, à accepter ses choix et ses renoncements, à se faire confiance.
Et par ricochet, elle nous sert d’exemple !
Ne juge pas si lointain ce qui peut s’atteindre
Bien que le couchant t’en sépare
Ni si proche ce qui, voisin,
Est plus loin que le soleil.
Au-delà de Juno et de ce trek, Aurore Gomez implante son roman dans un décor géographique et économique particulier, et donne à ses autres personnages des consistances très intéressantes, explorant toute la richesse des sentiments et agissements humains, qu’ils soient foncièrement égoïstes ou profondément altruistes.
L'espoir sous nos semelles est un roman d’apprentissage haletant, une aventure hors-norme et un grand coup de cœur !
Merci aux Editions Magnard Jeunesse
Ce roman participe au Challenge « Petit Bac 2018 » d’Enna pour ma 7e ligne, catégorie Objet.
Belles lectures et découvertes,
Blandine
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