Mes lectures de la Rentrée Littéraire de janvier 2024

Publié le 6 Février 2024

Des centaines de nouveaux livres de tous genres confondus sont attendus pour cette nouvelle Rentrée Littéraire. Et à nouveau, plusieurs titres m'ont donné vraiment très envie de les découvrir! Retrouvez ici ceux que j'ai lus et et ceux que je compte lire, mes avis remplaceront progressivement les présentations des éditeurs au fur et à mesure de mes lectures!

La Louisiane. Julia MALYE. Éditions Stock, à paraître en janvier 2024

Un roman magistral qui nous emmène en Louisiane, alors française, au XVIIIe siècle. Nous sommes auprès de trois femmes, Charlotte, Geneviève et Pétronille, que nous allons suivre pendant environ 20 ans, arrachées à la France en vue de peupler cette terre nouvelle. Sororité, amitié, luttes, émancipation, pouvoir sont au cœur de ce roman historique au souffle sensoriel intense et où l'on sent les nombreuses recherches de l'autrice pour nous y immergr.

Sa chronique ICI

"Elles attendent ce moment depuis des mois et maintenant qu’elles sont là, elles se sentent indécises, mal à l’aise, un peu tristes. Que leur reste-t-il à espérer, une fois le voyage terminé ?"

Tosca. Murielle SZAC. Emmanuelle COLAS, janvier 2024

Lyon
Nuit du 28 au 29 juin 1944, sept hommes, juifs, sont fusillés en représailles.
A leur côté, leur nom sur une feuille.
Sauf pour un... Devenu "L'Inconnu de Rillieux".

Cet Inconnu hante Murielle Szac depuis trois décennies, depuis qu'elle a découvert sa mort et son anonymat tragiques par hasard. Alors elle lui rend un vibrant hommage dans ce court, et inéluctable, roman qui retrace les dernières heures de sa vie et de ses compagnons d'infortune, enfermés avec deux jeunes Résistants.

Elle leur entremêle des paroles choisies de Tosca, l'opéra de Puccini que l'Inconnu (qui se fait appeler Ange) chante, des figures mythologiques à la sombre et honteuse histoire de la milice française qui a assisté, anticipé même, les demandes antisémites nazies

C'est un poignant "roman pour aujourd'hui" que Murielle Szac nous livre, tout en délicatesse et dramatique beauté.
"Pour que rien ne puisse recommencer".

Le Cousin. Michèle AUBRIERE. Antoinette Fouque, "des femmes", janvier 2024

PREMIER ROMAN

Paris, années 50 jusqu'au "aujourd'hui"

Le grand frère de Camille est mort, sa mère en dépression, son père réfugié dan son entreprise de camions et elle, délaissée. Aussi quand un cousin venu de Vendée vient travailler en tant que mécanicien, y place-t-elle une figure fraternelle. Il apporte au sein de ce foyer terne et triste la vie. Il leur permet de sortir, de redécouvrir Paris et ses beautés, de rire, de s'amuser. Mais un jour, alors que Camille a grandi, que des formes se dessinent, le regard du cousin sur elle change. Dans sa candeur, la fillette ne voit pas, ne comprend pas. Son corps saisit le danger avant son esprit mais il est trop tard. Elle essaie de s'en prémunir, d'en réchapper, de séduire, de s'y faire, de s'écarter... jusqu'au jour où cela va clairement plus loin.

Dans un récit sans ambages, Michèle Aubrière se livre. Car si elle a choisi la fiction, il s'agit bien de son histoire. Elle décrit les différents mécanismes d'approche du Cousin comme de défense de Camille, comment le Cousin assure sa place dans la famille, s'assure son silence auprès d'elle et ce qu'il cache en réalité... Et bien sûr les conséquences sur le très long terme pour Camille. En parallèle, et en métaphore de son histoire, se fait le récit de la maison dans laquelle son père voudra rester jusqu'au bout, jusqu'à sa destruction en vue de la transformation de Paris. La disparition, destruction de la maison, apparaît comme une étape dans sa reconstruction à elle.

Un récit évidemment fort, parfois cru, et qui, s'il est nécessaire, n'a pas su totalement m'émouvoir, pas autant que je l'aurais souhaité.

Créatine. Victor MALZAC. Scribes / Gallimard, 2024

PREMIER ROMAN

Dans un long monologue à peine chapitré (leurs intitulés sont géniaux), un adolescent puis jeune homme, raconte son but (unique) dans la vie et le moyen qu'il se donne pour y parvenir: séduire TOUTES LES FEMMES en acquérant du muscle par tous les biais nécessaires et possibles. Si lui est premier degré, le livre ne l'est absolument pas et permet de pointer toutes les injonctions faites aux hommes, les héritées, transmises, sociales. Insatisfait, désireux du toujours plus, candide parfois même idiot, sensible et pudique sur des sujets anodins, notre jeune homme est au contraire beaucoup trop ouvert voire indifférent sur ce qui crée d'ordinaire des hontes. Et ainsi se raconte-t-il, lui qui a découvert son but avec Conan le Barbare, qui idolâtre Schwarzenegger, qui expulse ses pulsions et frustrations par des masturbations excessives, qui se trompe dans tous les chiffres mais que plus yen a et mieux c'est, qui a une relation conflictuelle avec son père, l'anti modèle absolu.

L'ai lu ce premier roman de Victor Malzac (qui a auparavant publié deux recueils de poésie) comme en apnée tant ses phrases sont longues, ses pages remplies et les pensées de son narrateur en boucle. C'est une forme narrative assez particulière, parfois oppressante, mais qui pointe avec d'autant plus de force les obsessions virilistes masculinistes qui ont toujours cours, et malheureusement qui reviennent même.

Et puis quelle couv'!

La souris qui voulait sauver l'ogre. Françoise GUERIN. Éditions Eyrolles, 4 janvier 2024

Maya Van Hoerenbeck, psychologue, est envoyée à Sète par la cellule Cornelia pour établir une autopsie psychologique suite au suicide d'une jeune étudiante de la Rédemption, Ecole d'études supérieure. 

Pauline Cassan était une jeune fille brillante, investie, élue au Conseil d'administration, active dans son association étudiante "Décroissance" en lien avec l'environnement. Mais, venant des quartiers non aisés, elle avait dû faire face à une ostracisation toujours plus étouffante et perverse.

Maya, qui revient dans la ville de son enfance et avec un passé douloureux non résolue, agit avec méthode, interroge la Directrice de l'établissement qui n'a pas agi comme il aurait fallu, qui s'oppose fermement à son enquête, redoutant que cela n'affecte l'image de son établissement, elle rencontre plusieurs professeurs aux profils variés, engagés, désabusés ou antipathiques, les élèves, plus ou moins empathiques, et bien sûr les parents, la famille de Pauline.

J'ai beaucoup aimé cet épais thriller psychologique malgré quelques longueurs et facilités. Deux enquêtes parallèles sont en réalité menées par Maya, celle concernant Pauline, et celle de Maya sur elle-même et son passé, et j'ai trouvé que ce dernier aspect aurait pu ne pas être, ou pas si lourd. L'autrice a voulu trop en mettre. D'autant que Maya se trouve seule à Sète, son coéquipier n'ayant pu l'accompagner car plâtré d'une jambe, un coéquipier bien intuitif qui se trouve être un très bel homme venu du Québec, et avec qui tout semble naturellement se délier. 

Au-delà, j'ai trouvé particulièrement intéressant cette notion d'autopsie psychologique, que je ne connais pas. Elle concerne tous les aspects qui suivent un suicide: ici, la prise en charge psychologique, voire physique, des élèves et adultes, immédiatement après les faits, voire sur le long terme, les différents interrogatoires des différentes personnes pour cerner la personnalité et la psychologie de la personne décédée et comprendre, cerner ses décisions et la dernière en particulier, comme déterminer les responsabilités de chacun. Et ceci est particulièrement bien rendu.

Au-delà, l'autrice aborde aussi les différentes sphères sociales de notre société, les apparences, les faux-semblants, l'écologie et l'environnement, l'engagement des jeunes (ou plutôt de certains), le mal-être adolescent (et ses causes).

Nul doute que l'on entendra (re)parler de la Cellule Cornelia!

Le plus petit dénominateur commun. Pirkko SAISIO. Robert Laffont, janvier 2024

Premier volet d'une trilogie dans laquelle elle se raconte, Pirkko nous fait ici deux récits. Son enfance jusqu'à ses dix-douze ans en tant qu'enfant unique dans une famille athée et politisée avec l'adhésion au Finlande-URSS, le contexte social et sociétal d'alors, les avancées technologiques, les étés passés chez Papi et Mamie et la perception qu'elle a d'eux et de leurs caractères comme de leur quotidien, la relation à sa mère, aimante, à son père, plus distante, puis son entrée à l'école, dans différentes écoles. Le tout avec ses observations à hauteur d'enfant et ses remarques d'une maturité toute candide et juvénile. Et la genèse de ce récit suite à la mort de son père dont on découvre les derniers jours. Les deux s'entremêlent sans que le passage de l'un à l'autre soit toujours marqué.

Pirrko dit "je" quand elle est dans l'action et "elle" quand est en réflexion. Il n'est d'ailleurs pas toujours aisé de toujours savoir à qui renvoie ce "elle" car il y a tant d'autres "elles" qui gravitent autour d'elle. Elle s'interroge sur l'identité, sur ce qui la forme, et sur le genre, répétant souvent qu'elle voudrait être un garçon, et tout en observant les hommes et les femmes et ce qui les distinguent ou non.

La forme qu'elle donne à son roman, à sa narration, est intéressante. Des sauts de ligne après le premier mot de la phrase font comme des respirations avant de clamer la phrase, l'idée, comme s'il fallait prendre ou avoir du courage.

Un premier volet qui sera suivi des deux autres (quand ils paraîtront) car la dénomination de "grande gueule de Helsinki" de la 4e de couverture qui décrit son autrice m'interroge beaucoup! et il me semble que la vie de Pirkko a dû être très haute en couleurs!

Le ciel ouvert. Nicolas MATHIEU. Dessins d'Aline Zalko. Actes Sud, février 2024

Un nouveau livre de Nicolas Mathieu? Ouais, non, bof, je suis toujours avec ma déception en demi-teinte de Leurs enfants après eux
Et puis le recevoir, le feuilleter, le reposer
Il est beau ceci dit avec son petit format, sa couverture veloutée et surtout les dessins colorés, mouvants, vibrants d'Aline Zalko
Attirance
Un peu, beaucoup quand même
Le reprendre
Lire ici et là
Ah oui, oui, oui oui
"Ne cède rien de ta joie" qu'il nous écrit !
Mais il parle de moi là et là et là
Et puis l'urgence
Lire, lire, vite, se cogner aux mots, se laisser porter, se reconnaître, un peu beaucoup, trop. Les mots qui slament dans ma tête, différentes rimes, différents rythmes
Vouloir retenir
Revenir aussi
Une histoire? Des histoires? Nos histoires !
Moi, vous, eux, nous
L'Amour, les amours, le désir, les envies, l'intranquillité, être enfant, être parent, ce temps qui passe, inexorable
Choisir, subir, transmettre, vivre, faire des erreurs, recommencer, observer
C'est rien et c'est tout à la fois, le tristement banal et le terriblement intime
Et fatalement, j'aime !

La Maison Noire. Yûsuke KISHI. Belfond, février 2024 / LU

Autant La leçon sur le mal avait été sanglante, autant cette Maison Noire exerce une aura, une emprise, une paranoïa, une usure psychologique sur Wakatsuki, jeune agent d'assurances du département des décès, dont il a la charge de déceler les incohérences dans les avis.

Devant se rendre chez un certain Komoda (c'est un fait coutumier que de se rendre chez les clients), il entre dans cette maison à l'apparence lugubre et à l'odeur pestilentielle. L'homme l'enjoint à ouvrir une porte coulissante, mais au lieu d'un enfant faisant ses devoirs, Wakatsuki se trouve en face d'un cadavre. L'enfant semble s'être pendu. Tétanisé, il constate avec horreur que l'homme ne regarde pas le petit corps, mais lui, sa réaction à lui. Dès lors, il en est persuadé, il ne s'agit pas d'un suicide mais d'un meurtre. Qui entraine une longue enquête de la part de la police. Si longue que chaque jour, sans jamais hausser la voix ni s'emporter, Komoda vient réclamer l'argent de l'assurance. Il supplie, en va jusqu'à se faire du mal, toujours sans brusquerie. Et chaque jour, Wakatsuki redoute de venir au travail, redoute de le croiser, redoute la réaction que cela pourrait entraîner sur ses collègues, en particulier les femmes.

A nouveau, Yûsuke Kishi dissèque les mœurs et les changements de son pays et de sa société. Ici sous l'angle des assurances, qui sont nombreuses chez les Japonais qui n'hésitent pas à souscrire à plusieurs. Et inévitablement, cela entraîne des arnaques (certaines nous ont révélées, c'est saisissant!). Le microcosme de la société dans laquelle il travaille est le reflet de la société nippone dans son ensemble: ne pas faire de vagues, ne pas s'attirer les regards, protéger les femmes (qui apparaissent bien faibles, à l'exception de deux), respecter le collectif au détriment de l'individu. Il nous offre une réflexion sur le Mal, sur la nature humaine et une évolution, peu flatteuse mais étayée, puisqu'elle tend à l'individualisme, à la psychopathie même.

Lombroso croyait que l'humanité évoluait vers une société sans crime, c'était un idéaliste. C'est pourquoi il considérait les délinquants comme des ratés de l'évolution humaine. Alors qu'en réalité, les psychopathes représentent une nouvelle souche de l'humanité, qui s'adapte à nos nouvelles conditions de vie.

Je suis plus mitigée sur ce roman. L'intrigue est plutôt convenue. Son originalité tient au lieu, le Japon et à ses manières de faire, ses codes sociaux et relationnels. La fin s'interroge et nous interroge, j'ai trouvé cela facile. Enfin, je retrouve ce côté occidental qui m'avait marquée dans La leçon du mal: dans le phrasé, les descriptions, le vocabulaire et quelques attitudes. A croire qu'il a été écrit "pour nous". Pour conclure, ce n'est pas tant ce que vit Wakatsuki qui est glaçant, mais bien ce que l'être humain est capable de faire aux autres et à soi-même, pour de l'argent, du pouvoir et, pire, la satisfaction de ses désirs les plus extrêmes.

Entends ma voix. Zelda LOCKHART. HarperCollins, 7 février 2024

PREMIER ROMAN

Ce roman nous permet d'être aux côtés des différents membres d'une famille noire sur plusieurs générations et notamment de ses filles et femmes. Il nous montre l'héritage des violences et des traumatismes, la répétitions des schémas, par le biais d'une Voix qui s'exprime à chaque début de chapitre, en italique.

Et tout en progressant dans le temps, nous remontons les générations, parcourant les chemins empruntés, de la Caroline du Nord au Mississippi rural, en Corée et au Vietnam, jusqu'à la terre originelle du Ghana, là où la Voix prend racine, là où les traumatismes commencent, là où tout peut trouver sens et se résoudre.

Un très bon (premier) roman qui fait tout de même des longueurs, même si je suis sensible à cette narration imagée des Voix et de l'Esprit.

Je vous en parle davantage ICI.

Une simple intervention. Yael INOKAI. Zoe, 2024

Meret est infirmière dans un grand hôpital. Un jour, elle est approchée par un chirurgien réputé qui aimerait qu'elle travaille au bloc avec lui, car son "empathie" l'intéresse. Il exerce une nouvelle pratique médicale. Grâce à une nouvelle opération, il soulage les patients de leurs douleurs pour leur offrir une vie meilleure. C'est ainsi que se crée sa valise bleue qui se remplit d'objets, pour aider les patients dans leurs émotions. Meret ne pose pas de questions, ravie de pouvoir souvent échanger longuement dans le bureau de ce chirurgien chaque soir, lui permettant de le connaître, en tant qu'homme et dans ses petites habitudes.

Dans le même temps, Meret se lie davantage avec sa colocataire Sarah, infirmière de nuit au 3e étage de l'hopital, qu'elle ne croisait quasiment jamais. Entre elles deux se lie une relation amoureuse, mais que l'on devine interdite.

Cet endroit, cet hôpital, avec son foyer d'infirmières, semble reposer sous une chape de plomb, semble évoluer en vase clos, sans que ne soient donnés des détails temporels. Meret s'interroge finalement sur le bien-fondé de cette thérapie lorsqu'une de ses patientes (à la famille fortunée) ne se réveille pas. Quel en est le but véritable?

En parallèle, nous est dévoilée son enfance avec sa famille, son frère et surtout sa sœur, Bibi, qui était somnambule et qui est partie découvrir le vaste monde!

Ce roman m'a plu même si j'ai retrouvé un peu de cette atmosphère particulière qui m'avait à la fois intriguée et distanciée dans Trois âmes sœurs de Martina CLAVADETSCHER. Le récit se nourrit de mystères, d'ellipses, de non-dits, bien que l'on devine assez vite la raison de ces interventions. Ce roman aborde la liberté d'être, les jeux de pouvoirs, et une quête d'émancipation.

Une maman parfaite. Marie-Fleur ALBECKER. Aux Forges de Vulcain, 26 janvier 2024

Ce roman nous transporte auprès d'Anne, Hélène, Louise et Gabrielle. Quatre femmes, quatre manières de vivre (ou non) la maternité. Nous sommes surtout auprès d'Anne, en couple avec Matthias, qui, la trentaine passé, voudrait un enfant. Mais il ne suffit pas de vouloir pour avoir, et le parcours va se révéler ardu. La première partie, jusqu'à l'accouchement est sur un ton mordant et sarcastique quand la seconde tend à dire que la maternité est aussi unique qu'intime et que chacune fait comme elle peut, et qu'il ne doit pas y avoir de jugement. Rien de bien nouveau mais il est tout de même bon de le rappeler. Bien sûr, le texte est parsemé de ces phrases que l'on ne cesse d'entendre, qu'elle que soit l'attitude ou le choix (ou non choix) de chacune. Un roman qui se lit vite et bien.

Ceux qui appartiennent au jour. Emma DOUDE VAN TROOSTWIJK. Editions de Minuit, janvier 2024

PREMIER ROMAN

Issue d'une famille de pasteurs néerlandais, la jeune narratrice (et possiblement autrice), revient après plusieurs mois d'absence dans la maison parentale, un presbytère quelque part dans la campagne française.

Les changements chez chacun des membres de sa famille la saisissent.

Il y a Opa, son grand-père, que la maladie d'Alzheimer a considérablement affaibli et qui lui demande souvent qui elle est. Il y a son père qui a fait un burn-out l'année passée et qui peine à s'en remettre. Il y a son frère, Nicolaas, qui s'apprête à embrasser la carrière familiale mais qui s'interroge, qui doute, qui fuit. Et il y a sa grand-mère, Oma, toujours là dans son effacement, comme sa mère.

Tous semblent être à un tournant de leur vie, à un point de bascule, c'est d'ailleurs ce que veut dire le titre en néerlandais, quand en français, nous disons que nous sommes "sur le fil".

L'écriture douce de l'autrice s'accompagne et s'enrichit de mots dans cette langue pour saisir au fil de petits paragraphes ou courts chapitres, des moments de bonheur passés ou présents. Pour rester dans la lumière, du côté de la vie et de la joie d'être ensemble dans les petits et moments quotidiens comme dans les grands.

Un premier roman à découvrir et une autrice à suivre, assurément!

Odyssée Lumpen. Alberto PRUNETTI. Lux Editeur, 2024

Premier de sa famille ouvrière à avoir fait des études supérieures, notre narrateur quitte sa Toscane natale pour l'Angleterre et Londres surtout, pour y travailler. Ce qu'il va y trouver ne correspondra pas à son imagination ni à son attente. Ainsi va-t-il aller de petits boulots en petits boulots, l'attendu pizzaiolo, puisqu'il est Italien et même si le restaurant déborde de clichés. Le premier est tenu par une marâtre sicilienne qui mégotte sur tout, le deuxième par des Turcs. Il va être préposé à la plonge avant d'être homme de ménage d'un centre commercial et travailler en compagnie d'un homme à la carrure de Pavarotti, spécialiste du débouchage de WC... Autant ses différents jobs sont manuels et exercés par la manne exploitable des immigrés, autant il déboulonne les clichés par sa culture artistique, littéraire, philosophique, etc. L'une de ses cibles est Margaret Thatcher, car elle incarne bien le mépris de la classe ouvrière, la fracture sociale et sociétale. Cynisme et humour noir sont au rendez-vous de ce roman qui n'offre pas beaucoup de lumière ni de chaleur, même sous le beau soleil d'Italie.

Un amour de poisson rouge. Kanoko Okamoto. Editions Bartillat, février 2024

Fukuichi a repris l'élevage de poissons rouges d'ornement de son père adoptif. Il tente par de nombreux moyens de créer le poisson rouge parfait. Son modèle, sont idéal, sont incarnés par Masako, une jeune fille qu'il connaît depuis l'enfance, qu'il harcelait à l'école avec les copains, et qui se trouve être la fille d'un riche propriétaire terrien, et qui achète souvent des poissons rouges. C'est d'ailleurs cet homme qui a financé ses études et lui a permis de continuer la pisciculture. Mais les temps changent au Japon, et bien que le poisson rouge d'ornement se soit exporté, il n'est pas facile de maintenir l'exploitation...

Ce roman, qui date de 1937, est le récit d'un amour contrarié et d'une quête d'idéal. Plus que son histoire, c'est la riche postface de Lucien d'Azay qui m'a passionnée. Il nous décrit qui fut l'autrice et quel était son style, cet attrait pour le poisson rouge et les diverses hybridations qui se sont succédées.

Les Sept Lunes de Maali Almeida. Shehan KARUNATILAKA. Calmann-Lévy, 3 janvier 2024

Présentation de l'éditeur

«  Chaque âme a le droit d’errer sept lunes dans l’Entre-Deux. Pour se souvenir de ses vies passées. Et ensuite, pour oublier. Ils veulent que vous oubliiez.  »
 
1990, Colombo. Alors que la guerre civile au Sri Lanka est à son apogée, le photographe de guerre Maali Almeida se réveille dans un grand bureau céleste. Une employée harassée l’informe brusquement qu’il est mort, son cadavre gît dans les profondeurs du lac Beira. Depuis cet Entre-Deux, une dernière chance s’offre à lui : Maali dispose d’une semaine – sept lunes –, pour résoudre le mystère de son propre meurtre et révéler des clichés qui changeront le cours de ce conflit sanglant et sans merci.
 
Il se lance alors dans une enquête rocambolesque au coeur de la capitale sri-lankaise avant que son témoignage sur des atrocités ne tombe entre de mauvaises mains, ou pire, dans l’oubli.
 
S’inspirant du folklore et de la mythologie du Sri Lanka, Shehan Karunatilaka brosse un portrait kaléidoscopique des vivants et des esprits, personnages romanesques ou figures historiques, qui cherchent tous vengeance ou vérité.

Et vous, quelles sont vos lectures de la Rentrée Littéraire?

Belles lectures et découvertes,

Blandine

 

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A
Je n'en ai lu aucun mais plusieurs me tentent comme La Maison Noire :)
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B
Tu m'en vois ravie! La Maison Noire offre un bon moment de lecture remuant ;-)
F
Wow, "Créatine" interpelle, c'est sûr !! Biz, Blandine, et douce fin de semaine. ^_^
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B
Merci Fondant!! Belle fin de semaine à toi aussi <3
P
Eh bien, bonnes futures lectures et bon weekend !
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B
Merci beaucoup Pati, pour toi aussi!
C
Je mets le billet de côté pour prendre ce qui me plaira... Déjà du retard dans mes challenges ! Belle fin de semaine
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B
Merci :-) Bon début de semaine à toi!
S
Tu as fait des découvertes passionnantes ! Je fuis généralement les rentrées littéraires. Je note en revanche volontiers les bons conseils mais je lis plus tard, quand la frénésie est retombée et que les livres sont à nouveau disponibles en bibliothèque.
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B
Disons que comme c'est mon métier, je me dois d'être au cœur des Rentrées Littéraires ;-) Mais avant, je faisais comme toi!