La Madeleine de Proust. Marcel PROUST illustré par Betty BONE (Dès 6 ans)
Publié le 17 Juillet 2015
La Madeleine de Proust
Texte de Marcel PROUST et illustrations de Betty BONE.
Éditions Courtes et Longues, collection « Petit livre/Grand texte », 2011.
Dès 6 ans.
Notions abordées : Littérature classique, mémoire, souvenir, enfance.
Lorsque j’ai vu ce titre sur le catalogue des Éditions Courtes et Longues, j’ai immédiatement eu envie de le découvrir !
Même si j’avoue n’avoir pas encore réussi à lire du Proust… Et pourtant, j’ai essayé et réessayé de lire sa Recherche du Temps Perdu, sur livre papier, sur liseuses, et même en livre audio.
L’aborder par le biais d’un album qui offre trois extraits du premier volume de la Recherche, Du côté de chez Swann, est donc à la fois une très bonne idée, un bon compromis et une envie de découverte ultérieure.
Trois versions abrégées, mais fidèles, qui offrent au jeune lecteur, et aux adultes, un résultat accessible et fluide qui nous transporte à Cambray, village dans lequel le jeune Marcel Proust passait ses vacances. Trois extraits axés sur le souvenir, la mémoire, la tendresse et le premier émoi amoureux.
Les illustrations pop, très lumineuses et dynamiques, suggèrent au premier regard un style très épuré mais fourmillant de détails à qui s’attarde un peu.
Il y a d’abord La Madeleine, qui a donné son titre à l’album. Une image si forte, si célèbre, que la Madeleine de Proust est devenue une expression de la langue française symbolisant un doux souvenir d’enfance, magnifié, presque une image d’Epinal.
Un jour d’hiver,
comme je rentrais à la maison,
ma mère, voyant que j’avais froid,
me proposa de me faire prendre un peu de thé.
Elle envoya chercher un de ces gâteaux courts et dodus
appelés Petites Madeleines.
A peine le petit bout de gâteau trempé dans du thé est-il porté à sa bouche, que Marcel assiste à une implosion de ses sens.
Les souvenirs rejaillissent en lui, s’élargissant comme des cercles concentriques.
Le dessin de son visage qui se déforme et se délite pour se commuer en Cambray, la figure parfaitement !
Mon fils de 5 ans a d’abord cru qu’il s’étouffait !
Il est vrai que les sens de l’odorat et du goût possèdent une capacité de réminiscence bien plus intense que celui de la vision, ou même de l’ouïe.
Vient ensuite Le drame du coucher, lorsque sa mère venait lui donner un dernier baiser pour qu’il s’endorme. L’impatience de l’attente, tous les sens en éveil, atteint son apothéose par ce moment si doux mais si furtif.
Il annonçait celui qui allait le suivre, où elle m’auraitquitté, où elle serait redescendue.
Impossible de le prolonger ou de le répéter de crainte de voir le doux visage de sa mère contrarié, ce qui aurait annihilé tout le bien-être ressenti.
Les couleurs choisies nous immergent dans cette bienheureuse mais douloureuse sensation avec de grands aplats de noir et rouge et les quelques lignes qui forment les contours.
Pour finir Gilberte, du nom de la jeune fille qui a suscité en Marcel son premier émoi amoureux, cruellement non partagé. Elle prête son visage à la couverture de l’album. C’est le texte qui m’a le moins parlé. Ceci est du à une incohérence (voulue) dès la première page, entre le texte et l’illustration. Gilberte est représentée avec de grands yeux bleu azur, or, Marcel écrit : Ses yeux noirs brillaient.
L’explication se trouve quelques pages plus loin.
L’album se clôt sur des extraits plus larges du texte de Marcel Proust dans lesquels ont été piochés et judicieusement assemblés ceux formant l’album.
Ainsi, je découvre que les yeux de Gilberte sont bien noirs mais que l’illustration retranscrit le souvenir qu’en a gardé Marcel. La mémoire nous joue des tours et le temps aime à la modifier, la modeler…
Elle est si belle que Marcel veut lui crier tout l’inverse jusque pour qu’elle se souvienne de lui.
Ses yeux noirs brillaient et comme je ne
savais pas alors, ni ne l’ai appris depuis, réduire en ses
éléments objectifs une impression forte, comme
je n’avais pas, ainsi qu’on dit, assez « d’esprit
d’observation » pour dégager la notion de leur couleur,
pendant longtemps, chaque fois que je repensais à elle,
le souvenir de leur éclat se présentait aussitôt à moi
comme celui d’un vif azur, puisqu’elle était blonde ; de
sorte que, peut-être si elle n’avait pas eu des yeux aussi
noirs — ce qui frappait tant la première fois qu’on la
voyait — je n’aurais pas été, comme je le fus, plus
particulièrement amoureux, en elle, de ses yeux bleus.
Marcel Proust n’est pas un auteur pour enfant, et ce n’est, à mon sens, pas à eux qu’il s’adresse mais à la part d’enfance restée en chaque adulte et que le souvenir permet de garder vivante.
Même si le passage du temps en a modifié sa perception.
Pour autant, cet album peut parfaitement être lu et compris par des enfants !
L’écriture et le style sont considérablement allégés, permettant une approche (plus) sereine de ce grand texte !
Marcel Proust n'est pas un écrivain pour les enfants. Et pourtant, c'est à eux qu'il s'adresse lorsqu'il évoque une petite madeleine, un baiser de maman, ou ses premiers émois amoureux. Betty B...
Petite présentation de l’album sur Youtube !
La collection compte trois autres titres :
- Le crapaud de Victor Huge, illustré par Olivié Mazoué.
- Le bateau ivre d’Arthur Rimbaud, illustré par Damien Cuypers.
- Les animaux malades de la peste de Jean de La Fontaine, illustré par Olivier Morel.
Sur la fiche de chacun, il vous est possible d’en visualiser les pages.
Ce concept vous tente-t-il ?
Merci aux Éditions Courtes et Longues de m’avoir permis de lire et vous présenter ce titre qui participe au Challenge « Je Lis Aussi des albums 2015 » de Sophie.
Retrouvez les autres livres parus aux Éditions Courtes et Longues et présentés sur le blog ICI.
Belles lectures et découvertes !
Blandine
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J’ai déjà croisé le travail de Betty Bone dans la revue DADA numéro 182, consacrée à Keith Haring, dont je vous encourage à aller voir le site, très chouette ! http://www.bettybone.com/