Le silence est d'ombre. Loïc CLEMENT et Sanoe – 2020 (BD)

Publié le 25 Octobre 2023

Les contes des cœurs perdus
Le silence est d'ombre

Scénario de Loïc CLEMENT
Dessin de Sanoe

Éditions Delcourt, 2020
40 pages

Thèmes : Mort, Vie, Amitié, Violences, Espoir

Après la vie il y a la mort, et avant une nouvelle vie il existe un entre-deux que l’on appelle « le monde sombre »…

Et dans ce monde intermédiaire entre la Vie et la Mort, ce monde qui ne devrait être qu’une étape, se trouve Amun. Petit garçon au profond regard mélancolique, d’un caractère solitaire et réservé, il vivait en marge dans un orphelinat d’Afrique jusqu’à ce qu’un incendie l’emporte et mette fin à sa courte vie faite de souffrances.
Dans ce monde sombre, Amun est parfaitement heureux et à sa place.

Il parcourt la planète, observe la vie sous toutes ses formes et manifestations, souvent violentes et douloureuses, et « après avoir tant souffert, Amun a su trouver dans cet univers ouaté et aseptisé, un asile véritable… »

Pourtant, un jour gris, il fait la connaissance de Yaël.
Un enfant comme lui qui vit dans cet entre-deux mais au caractère opposé, solaire, rayonnant, fougueux.
Un garçon de son âge avec qui l'amitié est immédiate. Ensemble ils font tout, ils vont partout, ils découvrent, s'amusent, apprennent, se suffisent à eux-mêmes... jusqu'à ce qu'un voile prenne place dans les yeux de Yaël...

Friedrich Nietzsche écrivait : « Entre amis, il est si beau que le silence soit d’or, mais le rire bon et frais l’est beaucoup plus encore. »

Dès le titre, j’ai été saisie par cet album.
Avec délicatesse et subtilité, il aborde la peur et le désir de vivre, malgré tout, malgré les souffrances et les pertes, grâce aux espoirs et aux émotions vives, grâce à l'amitié.

Bien que l’idée de cet album accompagne depuis longtemps Loïc Clément (comme il nous le révèle dans une postface), c’est le dessin de Sanoe qui la sublime et lui donne autant de force que d’émotion.
Ses planches nous transportent.
Elles sont riches de symboles et significations multiculturels.
Elles n’occultent rien des atrocités de notre monde et nous immergent dans ce qu’il a de plus somptueux.

Si Amun et Yaël sont gris, ses couleurs se jouent des contrastes et des doubles sens, les teintes chaudes et réconfortantes n’ont rien de chaleureux, quand les autres, froides, nous dévoilent des moments d’intimité et d’unité.
Leur beauté et leur sensibilité sont renforcées par une économie de mots qui mêlent les sens, les perspectives, les métaphores et la poésie et nous offrent des questionnements existentiels sur la valeur de la vie, ses différentes formes selon l’endroit et le moment de notre naissance, sur ce qu’il y a après la mort, sur l’éventualité d’une réincarnation, et sur ceux qui nous accompagnent.