Mémoires d’un frêne. Park KUN-WOONG – 2018 (BD)

Publié le 9 Mai 2018

Mémoires d’un frêne

 

D’après une nouvelle de Choi YONG-TAK

Adaptation et dessins de Park KUN-WOONG

Traduit du coréen par Kete AMORUSO

 

Editons Rue de l’Echiquier BD, 26 avril 2018

304 pages

 

Thèmes : Corée du Sud, Histoire, Massacre, Mort, Mémoire, Nature

 

De l’histoire de la (les) Corée, je ne connais pas grand-chose, et paradoxalement, peut-être plus sur celle du Nord que du Sud.

Park Kun-Woong est un auteur de bande-dessinée sud-coréen très connu dans son pays (quatre de ses albums ont été traduits en français) et tous abordent sans détours la politique et l’Histoire de son pays.

Il a choisi d’adapter la nouvelle de son compatriote, dont le grand-père a trouvé la mort dans l’épisode relaté dans ce roman graphique, avec un dessin en noir et blanc, au trait épais et charbonneux, qui peut être aussi beau que rebutant.

 

Comme les Hommes ou les lieux, la nature a aussi une mémoire…

C’est par le biais d’un arbre, un frêne, témoin pas si malheureux, que nous remontons le temps, d’aujourd’hui à l’été 1950, jusqu’à un épisode (mé)connu comme « le massacre de la ligue Bodo ».

 

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, et dans le contexte de la guerre froide, les deux Corées se combattent. Au Sud, les autorités, militaires comme civiles, traquent les opposants politiques et leurs sympathisants, car ils craignent une contagion communiste.

 

« Mémoires d’un Frêne » nous raconte, au gré de plusieurs chapitres, l’un des épisodes de ce massacre, au nord de la région de Chungcheong (centre de l’actuelle Corée du Sud).

 

Début juillet 1950, notre frêne a 4 ans, et plusieurs jours durant, il assiste ce qu’il nomme des « évènements », « spectacles », « fêtes » : des centaines d’hommes, tous civils et habitants des environs sont acheminés, liés par des fils barbelés, par des policiers dans la vallée qu’il domine à peine.

 

Tous sont tués, leurs corps sont laissés là, s’entassant au fur et à mesure des exécutions, sur trois jours.

Et la nature fait son œuvre, avec l’arrivée de nombreux insectes et animaux en tout genre, se repaissant de cette manne nourricière.

 

Mais cela ne s’arrête pas là, avec la venue d’une famille, puis de dizaines qui viennent rechercher leur(s) mort(s).

Le frêne est à la fois fasciné, effrayé, ennuyé, nourri par ce « spectacle », mais aussi contrarié par la cassure de son tronc, dont il gardera trace.

 

Lire, et surtout voir, ce roman graphique, qui se clôt sur une double postface, a été aussi intéressant que glauque et difficile.

Les planches alternent entre des dessins de nature presque contemplative (ciel étoilé, les arbres et leurs feuilles, les montagnes et le soleil entre elles) ; ceux de la nature qui se repaît de la mort ; et ceux qui montrent l’effroi de ces hommes qui comprennent soudain ce qui les attend et qui tentent des réflexes de survie.

C’est puissant, horrible, et terrible à la fois.

Mémoires d’un frêne. Park KUN-WOONG – 2018 (BD)
Mémoires d’un frêne. Park KUN-WOONG – 2018 (BD)
Mémoires d’un frêne. Park KUN-WOONG – 2018 (BD)
Mémoires d’un frêne. Park KUN-WOONG – 2018 (BD)
Mémoires d’un frêne. Park KUN-WOONG – 2018 (BD)

Le massacre de la Ligue Bodo ne doit pas être perçu comme "un" événement global ayant coûté la vie à 200 000 personnes. Il faut plutôt s focaliser sur les 200 000 existences individuelles qui ont volé en éclats. Le travail de deuil aura été un véritable chemin de croix pour les familles.
Dénoncer le crime de l’armée et de la police nationale revenait à s’accuser ouvertement de communisme. Cette souffrance fait partie intégrante de notre histoire contemporaine.

Postface de Park Kun-Woong

Merci aux Editions Rue de l’Echiquier

Ce roman graphique participe au RDV BD de la semaine qui se passe aujourd’hui chez Noukette (Retrouvez-y toutes les participations du jour - CLIC).

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N
Ouch ! Le dessin ne m'inspire guère je l'avoue... A lire comme un témoignage plus qu'autre chose j'imagine.
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C
Pas facile niveau graphique et scénario... Je ne sais pas trop quoi en penser...
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B
Le mieux est peut-être de l'emprunter si elle croise ton chemin ;-)
L
intéressant mais puissamment terrible oui. Bon tu me laisses un peu de temps et pourquoi pas me pencher sur la BD Coréenne.
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B
Mais bien sûr ;-)
B
Pas facile du tout, comme sujet, mais intéressant, c'est sûr. Merci pour la découverte.
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B
Voilà!
G
J'aime beaucoup le graphisme. Bien envie de découvri cette histoire
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B
Je t'y encourage!
B
Pas trop mon style de prédilection... Je crois que je vais passer !
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B
Je comprends ;-)
M
Rho le dessin me glace... tout comme le sujet, peut-être trop pour moi.
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B
En effet, je n'ai pas fait dans le léger...
J
J'imagine à quel point ce doit être une lecture pesante !
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B
Pesante non, difficile oui, nécessaire certainement!
M
L'histoire pourrait me plaire, le dessin un peu moins :/
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B
Il est... spécial mais colle bien à l'atmosphère de ce roman graphique!
N
Tu fais de sacrées belles trouvailles en ce moment... dur mais je note !
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B
Merci merci :-) Je crois pouvoir dire que cela va continuer^^
H
Eh bien, un sacré contraste entre le titre et les dessins !
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B
Oui tout à fait!
J
Ouch, c'est du comme lecture. A voir, merci.
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B
Oui, mais bon vu l’événement décrit aussi...
C
Je tiens compte de l'aspect un peu dur mais il me tente quand même ... !
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B
:-)
M
J'avais hésité à le prendre et à te lire, je me dis qu'il ne v pas falloir que j'hésite une seconde fois si ce titre croise de nouveau ma route
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B
:-D Je ne regrette pas cette lecture, même si elle a été parfois difficile!
S
Ca a l'air super dur, mais je note.
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B
Oui c'est dur: l’événement comme son traitement!