Les innocents. GIPI – 2005 (BD)
Publié le 27 Décembre 2017
Les Innocents
Scénario et dessins de GIPI
Traduit de l’Italien par José AVIGDOR
Vertige Graphic & Coconino Press, 2005
Maintenant édité chez Futuropolis
32 pages
Thèmes : chronique sociale, amitié, jeunesse, innocence, temps qui passe, transmission, secret, vengeance
C’est avec Le Local (one-shot) que j’ai découvert le travail de GIPI.
Certes, son trait est … particulier, mais j’ai été touchée et cet album-ci me confirme cette attirance.
Il fait partie de la série (terminée) « Baci della provincia » (Bons baisers de la province).
"À peine deux mille ans qu'on parle du Christ. Pense à ça deux secondes". Dit l'homme qui ne croit en rien. "En admettant que l'enfer existe, il y a quatre-vingt-dix chances sur cent qu'il soit encore en construction".
Elle se compose des Innocents ; Ils ont retrouvé la voiture ; désormais réunis sous le titre Bons baisers de la province.
Ce (premier) album est celui du souvenir, du temps qui passe, des retrouvailles et de la transmission, pour mieux aller de l’avant.
Giuliano est en voiture avec son neveu de 10 ans, Andrea.
Il ne le voit pas souvent et pourtant une tendre complicité les unit.
Au lieu d’aller dans un parc de loisirs comme promis (et notamment à la mère d’Andrea, sœur de Giuliano), ils vont rendre visite à l’un de ses vieux potes « délinquants », Valerio, qu’il n’a pas vu depuis plus de dix ans.
Entre autres parce que Valerio a fait de la prison.
Sauf qu’il était « innocent ».
La route, en bordure de mer, est longue, tant mieux.
Car l’histoire que Giuliano s’apprête à raconter à son neveu l’est aussi.
« Entretemps, sans vraiment le vouloir, nous sommes devenus presque adultes ».
En peu de mots et beaucoup de silences, il lui raconte ses potes, la rue, la ville de Province « où il ne se passe jamais rien », éloignée de tout mais que la politique anti-terroriste d’alors rattrape.
Il lui raconte les deux flics mutés ici on ne sait pourquoi et qui les ont pris en grippe, il lui raconte l’abus de pouvoir, l’impossible plainte, la violence policière, la jeunesse abîmée et le désir de vengeance.
Qui est coupable, qui est innocent dans ces cas-là ?
Le regard léger et naïf d’Andrea comble les silences ou non-dits de son oncle.
Les retrouvailles sont à la fois brutales et pleines d’amitié.
La fin de l’album fait retomber la pression.
En toute innocence...
Gipi aime à dépeindre les petites gens, les laissés pour compte, ceux que la vie a malmené, ceux au mauvais endroit au mauvais moment.
Dans cet album, Gipi aborde les années de plomb italiennes, où, entre 1969 et 1980, l’Italie a connu de nombreux attentats d’ordre politique mais sans savoir (immédiatement) qui en étaient les coupables/responsables. Cela a contribué au climat délétère du pays et à des exactions de toute nature.
Ces années connaissent encore des répercussions aujourd’hui (exemple avec Cesare Battisti – CLIC)
Et Gipi de demander ce que veut dire "innocence", "être innocent" dans ce genre de contexte.
Toute la surface disponible de l’album est exploitée.
La couverture, sa quatrième et les rabats font partie intégrante du récit.
Il dit beaucoup tout en faisant aussi l’économie de moyens. Peu de pages et peu/pas de couleurs.
Ambiance chromatique d’un temps révolu.
Les couleurs du passé sont attribuées au présent par un lavis ocre.
Tandis que le récit de jeunesse est juste au crayon (ou stylo noir), sans couleur. Alors même que les visages sont très expressifs.
Bon, c’est vrai, ce n’est pas beau et pourtant, il y a plein de détails. Et l’émotion passe.
La fin allège cette ambiance, pesante, et triste.
Clin d’œil à la nouvelle jeunesse, à la culture populaire et au renouveau.
Maintenant, il me faut trouver le deuxième tome !
Cet album participe au RDV BD de la semaine qui se passe aujourd’hui chez Mo' (Retrouvez-y toutes les participations du jour - CLIC) ainsi qu’au Challenge de Martine « Il viaggio 2017 ».
Belles lectures et découvertes,
Blandine.
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