Le rêve de Sam. Florence CADIER – 2008 (Dès 12 ans)

Publié le 18 Février 2023

Le rêve de Sam

Florence CADIER

Gallimard Jeunesse, 2008
192 pages

Thèmes : Etats-unis, Ségrégation, Racisme, Lutte pour les Droits Civiques

Lecture Commune avec Enna et son fils Bastien (13 ans)

A dix ans, Sam a vu l’horrible se produire devant ses yeux.
Parce que ses parents ont voulu pouvoir voter, et ont insisté pour cela comme ils en avaient le Droit, ils sont morts brulés vifs sur une croix dans leur jardin.
C’est ainsi qu’avec Josh, son petit frère, ils sont partis vivre à Montgomery chez leur oncle et tante, Rosa Park (relation fictive).

Entre 1955 et 1964, Sam tient un journal de bord dans lequel il raconte son quotidien, ses désillusions, ses rencontres, l’engagement des autres qu’il va faire siens.
A ses côtés, nous allons vivre plusieurs des grands évènements qui ont ponctué la Lutte pour les Droits Civiques. Des faits réels, historiques et avérés, réagencés pour le bien de la fiction de ce Rêve de Sam. Un rêve pour lui-même, devenir Juge, et pour la condition d'homme noir aux Etats-Unis.

Bien sûr, il y a Rosa Parks qui va refuser de céder sa place assise dans le bus, initiant le boycott. Cette action courageuse et contestataire de sa tante lui permet de rencontrer Martin Luther King, de qui il restera proche jusqu’à la mort de ce dernier. Il recevra conseils et soutiens constants.

Puis, nous faisons sa rentrée avec lui en 1957 dans un Lycée auparavant réservé aux Blancs et subissons mépris, ignorance et insultes; nous entendons parler de Malcom X et de sa vision différente et plus musclée de la Lutte qui séduit Josh, qui la rallie. Leur relation, déjà tendue, s’en trouve rompue.
Nous effectuons des sit-in silencieux et non violents dans des bars et restaurants de Greensboro; nous sommes avec ses amis dans les Voyages de la Liberté, dans lesquels de jeunes gens Noirs vont en train d'un bout à l'autre du pays – ce qui n’est malheureusement pas du goût de tous.
Nous sommes dans les rues de Birmingham, défilant avec des enfants et adolescents malgré les lances à eau qui les propulsent à terre.

-Insolent, lâcha-t-il. Etes-vous inconscient au point de refuser d'être libéré ?
-Certainement pas, monsieur le juge, mais je suis surtout conscient d'être né noir dans un pays où mes droits ne sont pas respectés.

Nous faisons partie de la Marche sur Washington le 28 août 1963 pour aller écouter le célèbre discours du « Rêve » de Martin Luther King qui nous fait tant vibrer.

Dans le même temps, Florence Cadier nous raconte aussi la construction identitaire d'un jeune homme (amitiés, premières amours, trouver sa voie professionnelle, écartèlement entre les études et l’engagement) qui grandit sans parents mais avec d'importantes figures tutélaires, tandis que son jeune frère prend un engagement radicalement différent.

***

Florence Cadier nous a prévenus dans le prologue qu'elle allait englober réalité et fiction pour nous narrer tous ces évènements, avec pour but « de prendre conscience de l’importance du combat audacieux qu’a mené Martin Luther King. »
Cela permet d'avoir une vue d'ensemble des nombreuses et différentes luttes et mouvements, à la fois isolés et unis, solidaires ou opposés, et représentés par les deux frères, Sam et Josh. Malheureusement, leurs deux combats les rendent aussi très manichéens.
En réaction, sont aussi décrites les rejets et répressions, politiques et policiers, aussi virulents que violents. 

Concernant Rosa Parks, je n’ai pas apprécié le portrait que Florence Cadier en a dressé. De femme forte et engagée, elle devient apeurée pour son neveu (admettons) mais surtout fade.
Une phrase aussi m’a faite tiquer « Vous avancerez plus vite si nous vous aidons, nous les Blancs ». Une phrase dite par John, un ami de Sam, qui les rejoint lors des sit-in.
Cette petite phrase d’apparence anodine est tout à fait représentative d’un débat depuis quelques années : le « whitewashing » « un terme utilisé pour qualifier la réécriture de l'Histoire du point de vue blanc dans une œuvre de fiction ». Car en réalité, elle sous-entend que les Noirs ne pouvaient, ne peuvent, arriver seuls à gagner leurs Droits, leur Liberté, une reconnaissance, et qu’il leur faut nécessairement l’aide, l’appui, donc l’accord des Blancs. Ce faisant, cela caricature le racisme.
Cette polémique a beaucoup encadré la sortie du film La couleur des sentiments, adapté du roman éponyme de Kathryn Stockett, avec au casting Octavia Spencer notamment. Pour en savoir plus à ce sujet – CLIC

Personnellement, je ne suis pas aussi radicale. Je pense qu'il faut une avancée ensemble et égale, des Noirs et des Blancs, de faits, de pensées et d'actions institutionnalisés, et pas "juste une aide". Pour ici, l'époque dans laquelle aurait été dite cette phrase peut servir (peut-être) d'excuse.

“Actuellement, l’égalité entre les races parait acquise. Elle ne l’est pas.”

Au moment de ma lecture, je me disais que cela faisait trop, que cette forme noyait tous les aspects de la Lutte, et qu'il n'était pas crédible que Sam ait "tout" connu.
Après avoir laissé un peu de temps entre elle et la rédaction de ce billet, je suis un peu plus mesurée.
Ce roman constitue une très bonne entrée en matière pour qui souhaite découvrir sur la Lutte pour les Droits. Il convient ensuite de le nuancer et d’approfondir les connaissances.

Qu'en ont pensé Enna et Bastien? Allons lire leur(s) avis!

Ce billet participe à l'African American History Month d'Enna et à son "Petit Bac" pour ma 2e ligne, catégorie Prénom; ainsi qu'à l'Objectif PAL

 

 

 

 

Découvrez aussi l'avis de Nathalie

 

Belles lectures et découvertes,

Blandine

 

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N
Lu il y a un peu plus d'un an, j'avoue que je ne me souviens pas si la forme m'avait déplu ou non... Il me semble que j'avais pensé que ce roman façon "journal" serait plus facile à lire pour les plus jeunes, plus "digeste" qu'un documentaire...
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E
On est raccord : du bon sur le fond mais moins fan de la forme !
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