MOBY DICK. Bill SIENKIEWICZ – 2020 (BD)
Publié le 7 Septembre 2022
MOBY DICK
D’après l’œuvre d’Herman MELVILLE
Adaptation des textes par Dan CHICHESTER et Bill SIENKIEWICZ
Illustrations de Bill SIENKIEWICZ
Editions Delcourt, novembre 2020
46 pages
Thèmes : Classique, Aventure, Chasse, Folie, Philosophie, Quête
Il est fort probable que vous connaissiez, même sans l’avoir lu, le roman d’Herman Melville, Moby-Dick; or, The Whale (Moby-Dick ou le Cachalot).
Récit de la chasse obsessionnelle du Capitaine Achab à l’encontre de la Baleine Blanche qui lui a pris sa jambe, c’est un aussi un formidable roman d’aventure qui restitue avec force détails et réalisme, la pêche à la baleine, une activité pénible mais fort lucrative du XIXe siècle à laquelle Herman Melville participa lui-même.
C’est aussi un roman empreint de symbolique quant à la quête de l’Homme, en lutte contre la Nature qu’il tente de dominer, et surtout en lutte contre Lui-même, jusqu’à aller à la folie, à la perte.
Avec de nombreuses références religieuses, Moby Dick, raconté par un personnage dont l’identité est incertaine (« appelez-moi Ismaël »), est une réflexion profonde sur le Bien et le Mal.
Achab, poursuivait-on, voyait en Moby Dick l’incarnation monomaniaque de tous ces principes malveillants qu’on trouve dans l’univers… Forces maléfiques qu’Achab devait détruire s’il voulait s’en libérer et leur survivre.
Sujet à de nombreuses interprétations, études et illustrations (notamment en bande dessinée), Moby Dick questionne et fascine toujours autant.
Cet album, d’abord paru en 1990 (en anglais), et réédité dans un étrange format allongé (21.1 x 31.9 cm), suit la narration originelle en lui empruntant textuellement de nombreux passages.
Tout en le condensant férocement.
Car l’album est aussi court (46 pages) que le roman est épais (environ 750 pages).
Et pourtant !
Toute l’atmosphère oppressante, sombre, humide, suintante du roman est parfaitement restituée dans les illustrations très particulières de Bill Sienkiewicz.
Entremêlant plusieurs techniques, tels le dessin à l’encre, l’aquarelle, la peinture à l’huile ou le collage, il nous entraîne sur le Pequod, parmi les baleiniers, dont Queegeg, « sauvage des mers du sud », rencontré dans l’auberge «Au jet de la baleine, au début du roman, et pour qui Ismaël semble éprouver de l’amitié, ou encore les cinq fantômes entourant Achab.
Nous sommes entraînés dans cette démence, spectateurs impuissants, saisis, admiratifs.
Rien de tel que les périls de la chasse à la baleine pour alimenter cette sorte de philosophie géniale, libre, facile : une philosophie de Desperado.
Les dessins de Bill Sienkiewicz aux styles multiples explosent les cadres, se jouent des contours, floutent les vraisemblances, anonymisent les visages, génèrent des incertitudes, recréent des éclaboussures (sang, écume, étoiles), reproduisent des techniques anciennes comme pour légitimer la barbarie, l’aliénation, tout en l’inscrivant dans une lignée.
Les métaphores sont omniprésentes, les détails foisonnants.
La lecture des dessins nécessite qu’on y revienne, qu’on s’y attarde, qu’on les relie.
A chaque fois, des découvertes sont faites.
J’ai puissamment aimé cette appropriation graphique de Moby Dick, et je ne peux que vous encourager à la découvrir, comme le style unique de Bill Sienkiewicz.
Ce roman graphique participe au RDV BD de la semaine, qui se passe aujourd’hui chez Moka (CLIC); à notre Challenge dédié aux Classiques avec Nathalie ; au "Tour du monde en 80 Livres" de Bidib; ainsi qu'à L'Objectif PAL d'Antigone
Moby Dick est sur le blog:
- Album: Moby Dick. Fouca DABLI et Jame's PRUNIER
- Album: Le chasseur et la baleine. Paloma SANCHEZ IBARZABAL et Iban BARRENETXEA
- BD: Le Jour des Baleines. Cornélius et Tommaso CAROZZI
Belles lectures et découvertes,
Blandine