L’Autre côté la mer. GAUVIN, PECONTAL et D’EURVEILHER – 2019 (BD)
Publié le 17 Novembre 2021
L’Autre côté la Mer
Scénario de Gilles GAUVIN et Jean-Marc PECONTAL
Dessin de David D’EURVEILHER
Éditions Epsilon BD ! 2019
128 pages
Thèmes : Histoire, Première Guerre Mondiale, Île de la Réunion, Créole
"L’Autre côté la mer", c’est la France depuis l’Île de la Réunion.
Faisant partie du vaste empire colonial français, ses habitants sont mobilisables lorsque la guerre éclate même si "lalmagne personne i koné."
Beaucoup sont exemptés car trop faibles physiquement.
Benjamin Grondin, père de quatre enfants, analphabète et cultivateur à la Grande Ilette, est enrôlé. Pour un an croit-il...
Formé à Madagascar, envoyé à Gallipoli puis aux Dardanelles, Benjamin rentre ensuite sur son île d’une manière clandestine. Caché puis découvert, il choisira pourtant de retourner au combat, alors qu’il aurait pu rester auprès des siens, devenant infirmier sur le Louqsor, un navire-hôpital.
C’est par la voix de son fils Siméon, 13 ans en 1914, que son histoire nous est contée.
Une histoire fictive qui s’inspire d’une vraie pour mieux nous restituer la réalité de la Réunion à cette époque entre son héritage métis issu de l’esclavage, la précarité de sa population, sa vie politique et le rapport à la France, sa contribution à l’effort de guerre et la mémoire du conflit.
Au fil des planches qui alternent fonds noirs aux teintes sombres pour illustrer les combats de Benjamin, la peur du « Boche » et les terribles nouvelles, s’intercalent des planches aux couleurs plus lumineuses qui se déroulent sur l’île, auprès de sa famille, qui s’est agrandie. Le dessin des personnages est volontairement rond, avec beaucoup d’expressivité, et il me plaît beaucoup.
Mi konpran pas. Papa i koné pa ékri (...) Pétèt, larmé la-aprann ali ékri.
Les auteurs ont fait le choix de garder la langue créole dans leurs dialogues et courriers, ce qui ne gêne en rien la lecture, et nous permet de davantage nous immerger dans le récit. Mais ils ne montrent pas les difficultés de communication auxquelles Benjamin et les autres soldats ont pu être confrontés entre eux ou face aux autorités militaires.
Le français, langue administrative et militaire, est employé pour montrer le point de vue dominant, incarné par l’écrit (journal, courrier), les ordres, les officiels, utilisé par Siméon plus âgé.
Ce roman graphique est aussi beau, qu’émouvant et instructif.
D’abord parce qu’il rend hommage à l’engagement des Réunionnais durant la Grande Guerre, que je ne connaissais pas, aussi parce qu’il est complété d’un riche dossier qui entremêle l’Histoire du conflit, à celle de la Réunion et au personnage de Benjamin et le devoir de mémoire.
Un album à découvrir qui participe au RDV « BD de la semaine » qui se passe aujourd’hui chez Noukette (CLIC); à mon Challenge autour de la Première Guerre Mondiale; et au "Petit Bac 2021" d'Enna pour ma 9e ligne, catégorie Météo.
N'hésitez pas à lire l'interview très intéressante des auteurs - CLIC
Belles lectures et découvertes,
Blandine