Bulle ou la voix de l'océan. René FALLET – 1987 (Dès 9 ans)
Publié le 18 Septembre 2020
Bulle ou la voix de l'océan
René FALLET
Editions Gallimard Jeunesse, janvier 2014 pour la présente édition
128 pages
Thèmes : Aventure, roman initiatique, relations humaines, Nature
Je suis la mer. On me connaît. Je suis salée. Je suis bleue quand le ciel est bleu, verte quand le ciel est…vert. Si vous me préférez rouge, je suis la mer Rouge. Noire, je suis la mer Noire. Jeune, De corail. Etc.
(…)
Mais je peux être la tempête, j’emporte les bateaux, fais claquer les drapeaux ! Il ne faut jamais oublier qui je suis. Je suis très vieille, et les marins se signent quand je frappe à la porte de tous les cafés du port. Je suis la mer, avec ses poissons, ses baleines, ses jardins engloutis, ses trésors volés au roi d’Espagne, la mer avec ses fleurs, ses nuits noires et ses soleils noyés, la mer avec ses hippocampes, la mer avec ses coquillages, LA MER.
Admirez-la, observez-la, écoutez-la, la Mer !
C’est Snif la Méduse qui lui a soufflé l’idée de cette histoire à nous raconter.
Une histoire de Bulle…
Bulle est un coquillage, un magnifique coquillage de l'Océan Indien qui vit dans le Quartier de Lune.
S’il est doué de pensées, Bulle ne peut se déplacer seul et a besoin pour cela d’un mollusque.
Bulle a appelé le sien Gluc, du bruit qu'il fait lorsqu'il dévore ses laitues de mer, seule activité qui l'intéresse lorsqu'il ne dort pas, ne se lamente pas ou ne s'inquiète pas.
Mais un jour, Gluc meurt.
L'hiver a une âme, qui est le squelette de l'été. Les larmes ont une âme, elles sont le squelette de la joie. Les hommes ont une âme, qui n'est que le squelette de leur enfance(…) De toi à moi, la mort, c'est une situation d'avenir.
Bulle se désespère de ne pouvoir bouger et rester là à attendre... Quoi? sa fin, ou pire, d'être la nouvelle demeure de Bernard !
Soudain, du grabuge survient depuis la surface. Un bateau pirate, La Désillusion, aborde un navire anglais et Petit-Jean de Paimpol, qui périt dans la bataille, tombe mort auprès de Bulle. Il lui parle.
Par un magnifique concours de circonstances, ils reviennent tous deux sur le pont du navire et c'est ainsi que Bulle, qui vaut son pesant de pistoles et qui a son caractère quand il s’agit de chanter, est amenée sur la terre ferme, à Nantes où elle est vendue, volée, reprise, avant de prendre la poussière dans une taverne puis d’être acquise aux enchères.
Auprès de Béatrice, en Île de France, elle connaît la félicité, la joie d’être admirée, choyée, dorlotée, avant d’être remisée de longues années dans une armoire et de s’en échapper grâce à deux garnements et enfin, d’arriver entre les mains de Petit-Pierre.
Bulle, soufflait le garçon, tu ne peux pas me parler. Mais moi, si tu veux, je te parlerai. Je te parlerai d'amitié. Je t'apprendrai l'amitié. Tous les hommes courent après l'amitié par égoïsme, pour être moins seuls. Si je dois t'aimer, Bulle, ce sera pour ton bonheur à toi. Si je te sais heureuse, et je le saurai à tes couleurs, je serai heureux. Je lis sur les lèvres des hommes mais les tiennes ne bougent pas. Garde tes chansons, Bulle, je te dirai les miennes. Je m'appelle Pierre. Les grandes personnes m'appellent Petit-Pierre, mais je sais qu'au moins jamais tu ne deviendras une grande personne.
Et Bulle s'endormit entre le chien et Petit-Pierre.
Elle était arrivée au bout du chemin.
Elle avait fini par trouver ce fameux corail de la terre, et ce corail si rouge était celui du cœur.
C’est lors d’une brocante que j’ai acheté ce livre, attirée par la poésie du titre.
Et puis, le temps a passé, et cet été, décidée à enfin connaître les abysses de ma PAL, je l’en ai sorti.
Quelle merveilleuse idée ! Ce roman, j’aurais adoré le lire enfant, et si j’aurais aimé le redécouvrir en relecture, je me suis régalée de le lire en tant qu’adulte. Je le relirai avec mes garçons, c’est certain !
Bulle ou la Voix de l'Océan est un très beau roman d'aventures, d’apprentissage et d'amitié, du temps de la flibuste, qui regorge de métaphores et de réflexions sur le besoin d'avoir, sur les apparences et les illusions, l’espoir et l’évidence, sur les relations avec et entre les hommes et avec la nature, et notamment la mer.
L’écriture est tendre, facétieuse, parfois cruelle, poétique et qui recèle plusieurs niveaux de lecture. Un régal ! Elle s'accompagne de quelques dessins crayonnés deci-delà.
Tant de passages ont résonné, et sa dernière partie, très touchante, m'a beaucoup renvoyée au Petit Prince de Saint-Exupéry.
Et là, forcément, j’aime !