Les tableaux de l'ombre. Jean DYTAR – 2019 (BD)
Publié le 20 Mai 2020
Les tableaux de l'ombre
Jean DYTAR
Editions Delcourt et du Louvre, mai 2019
66 pages
Thèmes : Art, Peintures, Louvre, Célébrité, Humour
Le Louvre, plus grand musée parisien, 73 000 m² d'espaces d'expositions, 35000 œuvres exposées, 14,5 km de salles et couloirs, 30 000 visiteurs quotidiens, quelques nombres qui donnent le vertige.
Le Louvre et ses œuvres-stars, celles que l'on se doit d'avoir vues au moins une fois, même si c'est de loin, même si l'on est bousculé... La Joconde, La Liberté guidant le peuple, Le Radeau de la Méduse, la Victoire de Samothrace, la Vénus de Milo, pour ne citer que celles-ci), Pour avoir réussi sa visite, il faut les avoir vues, mieux encore, photographiées !
Alors forcément, au vu du monde et de la distance entre chaque, cela laisse peu de place, d'envie, parfois même de courage pour aller s'aventurer dans des salles ou départements moins connus, lorsqu'ils ne sont pas ignorés.
C'est ce que déplorent nos Tableaux de l'ombre, et particulièrement Tobias, Hilda, Caspar, Nils et Saskia, les personnages représentant les Cinq Sens, personnifiés et peints par Antonie Palamédès.
Vous ne connaissez pas ce peintre ni ces cinq petits tableaux ? Eh bien nous non plus avant de lire cet album (offert à mon 8 ans) qui les met à l'honneur.
Il faut bien avouer qu'ils ne sont pas avantagés.
Petits de taille, accrochés sur le mur à droite de l'entrée de la salle 902 (et donc dans notre dos quand on y entre) du tout petit département des collections privées, à la jonction entre les ailes Richelieu et Sully, au deuxième étage,il faut vouloir y aller, se laisser porter ou être perdu !
Ces cinq personnages en ont assez de cet état de fait !
Vingt ans qu'ils n'ont pas été observés, admirés. Les regards ne font que glisser sur eux. Pire, il n'y en a que pour le Placard à balais qui leur fait face. Non mais vraiment, un placard à balais !
Ah qu'il est loin le temps du salon de leur collectionneur !
Alors forcément lorsque la révolution gronde contre les Célébrités, certains veulent en être ! Beaucoup se souviennent de l'injustice et de l'humiliation qui leur ont été faites lorsque le Département des peintures italiennes a donné une fête, à laquelle ils ont été recalés car trop petits, pas assez célèbres, pas sur la liste, trop restreinte aux yeux de certains.
Venus des quatre coins du Musée, des personnages se sont rassemblés pour leur faire leur fête !
Mais est-ce vraiment leur faute à ces stars ?
S'ensuit donc un débat sur la célébrité, le rapport à l'image, la chance d'être exposé dans un Musée tel que le Louvre, l’évolution des goûts au-travers des siècles...
Et puis un an plus tard, une étrange effervescence règne dans la salle 902.
Les visiteurs se pressent, jeunes et moins jeunes observent nos personnages, prennent des selfies avec eux.
Mais que c'est épuisant cette célébrité aussi soudaine qu'éphémère, rendue possible grâce à la parution d'un certain album.
Et nous aussi, lorsque nous sommes allés au Louvre avec mon trio (et ma sœur), nous avons voulu voir nos cinq personnages. Eh bien ce ne fut pas chose aisée ! Après avoir arpenté nombre de salles, tourné en rond et demandé à plusieurs guides (pas plus avancés que nous), nous les avons enfin trouvés ! Et le « Placard à balais » aussi ! (de son vrai nom Vue d'intérieur – ou Les Pantoufles – de Samuel von Hoostraten),
On a donc pris notre temps pour les observer et les détailler.
Jean Dytar se met lui même en scène dans son histoire qui se déroule en trois temps.
Il multiplie les mises en abyme (j'adore!) et a choisi de représenter les œuvres et leurs personnages avec leurs fonds et/ou cadrages. Tous les personnages (et tableaux) sont ainsi aisément identifiables.
Les tailles des personnages reflètent celles de leurs tableaux, certains sont donc gigantesques et d'autres minuscules, les Rembrandt sont nombreux (autant que d'autoportraits du peintre au Louvre), le Saint Jean Baptiste de Léonard de Vinci (Jibé pour les intimes) a le bras droit toujours levé (et donc coincé) ou encore Monna Lisa qui ne peut pas être debout.
Sûrement un oubli du peintre.
Il paraît qu'il ne finissait pas toujours ses œuvres, Léonard...
Tu parles d'un chef d’œuvre !
Cet album, qui regorge de péripéties et d'humour, est un excellent ouvrage de vulgarisation artistique et engage une réflexion sur la notoriété à-travers le temps, les époques et ses moyens,
On se régale quelque soit notre âge !
Au-delà, il nous invite à aller au Louvre (et par extension dans d'autres musées) avec de nouveaux yeux, à être plus curieux, à sortir des sentiers rebattus et à observer autrement les œuvres.
Cet album participe au RDV « BD de la semaine », aujourd’hui chez Moka (qui nous entraîne aussi au Louvre; CLIC) ; au « Petit Bac 2020 » d’Enna, pour ma 5e ligne, catégorie Objet; ainsi qu'à l'Objectif PAL d'Antigone.
Aujourd'hui, Nathalie présente aussi un album de Jean Dytar, La Vision de Bacchus.
Belles lectures et découvertes !
Blandine
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