Le Bureau de Mariage de M. Ali. Farahad ZAMA - 2011
Publié le 25 Février 2020
Le Bureau de Mariage de M. Ali
Farahad ZAMA
Traduit de l’anglais par Sabine BOULONGNE
Editions France Loisirs, collection "Piment", novembre 2010
400 pages
Thèmes : Inde, Amour, Société, Culture
Lecture Commune avec Hilde, Myrtille et Isabelle
Vizag, ville côtière du sud de l’Inde.
M. Ali est à la retraite et se lance dans une activité pour occuper son temps, et accessoirement ne plus embêter sa femme.
Il ouvre une « agence matrimoniale pour gens riches ».
Aménagement d’un bureau chez lui, annonces publicitaires, premiers clients. Cela commence très bien pour lui.
Tellement bien qu’il lui faut une assistante, que sa femme trouvera en la personne d’Aruna, un matin sur le pas de sa porte.
Aruna est une jeune fille plutôt jolie qui a dû arrêter ses études pour travailler et ainsi aider sa famille dont les revenus ont drastiquement baissé suite à une erreur administrative sur la pension de son père, ancien professeur.
Elle a une jeune sœur, Vani, qui continue à aller à l’université.
L’agence de M. Ali acquiert rapidement une excellente réputation et les clients affluent et avec eux toutes sortes de profils et de demandes.
Des mères pour leur fils, des pères pour leur fille, des sœurs pour leur frère, des hommes ou femmes divorcés, voire même des veufs ou veuves.
Ainsi découvrons-nous comment les mariages sont organisés en Inde, par qui et surtout, à quelles conditions. Car il ne s’agit pas là de l’union de deux personnes, mais bien de deux familles, avec leurs critères de religion, de situation financière (avec l’épineuse question de la dot), le niveau d’études (j’en ai été surprise), et bien sûr, le système de castes, illégal mais toujours prégnant.
Mais rentrent aussi en considération, la teinte de la peau (plus elle est claire et mieux c’est), la taille, le nombre de frères et sœurs, leurs professions et lieux de vie…
-Mes parents ne sont plus de ce monde, aussi c’est moi qui pendrai la décision. Mon épouse aura son mot à dire, bien sûr. Et puis, de nos jours, les garçons veulent voire la fille et donner leur avis aussi, n’est-ce pas ? Ça ne se passait pas comme ça à notre époque. Mon père m’a annoncé un jour qu’il avait arrangé mon mariage avec la fille de son associé, et voilà tout. Les choses ont changé.
Le mariage est une affaire d’arrangement et non d’amour.
Aruna le sait bien.
Elle est pourtant en âge de se marier, et il ne faudrait surtout pas laisser passer le moment, mais aucun prétendant ne se présente à sa famille malgré les tentatives de son oncle Shastry pour convaincre son père.
Elle cache en elle une blessure secrète, un mariage avorté.
Au Bureau, elle est douce mais volontaire et surtout très efficace. Elle seconde idéalement M. Ali, qui ne saurait plus gérer son affaire sans elle.
C’est là qu’elle fait la connaissance de Ramanujam, un jeune et riche médecin chirurgien, venu en compagnie de sa mère et de sa sœur pour trouver une épouse.
Et là, nous comprenons bien vite que de profondes émotions l’animent et la bousculent.
Je ne me serais jamais attendu à ça de ta part. Je sais que ton père s’est braqué, mais nous le ferons changer d’avis. As-tu pensé à l’honneur de ta famille ? A l’avenir de Vani ? Quelle famille respectable l’acceptera sous son toit si tu te maries par amour ?(…) Que dira ton père ? Et ta mère ? Je regrette qu’elle ait vécu pour voir ce jour. Il aurait été préférable qu’elle meure avant de connaître un désastre pareil.
Sous une apparence légère, Le Bureau de Mariage de M. Ali est un roman très sympathique et très riche.
Pourtant, le premier tiers m’a semblé un peu plat et le défilé des clients, un catalogue.
Puis, le récit a décollé.
Décrit comme la version orientale d’Orgueils et Préjugés de Jane Austen, on en retrouve effectivement le modèle. Et c’est très intéressant d’observer comment Farahad Zama l’a adapté avec le portrait social et sociétal l’Inde, sa culture, ses traditions, ses religions, la famille, le progrès, la cuisine et surtout la condition féminine.
Les personnages principaux comme secondaires sont très bien travaillés et l’on se prend vite d’affection pour eux.
M. Ali a un caractère assez doux, sage, philosophe même parfois, mais il est assez blagueur, ce qui peut mettre mal à l'aise sa femme ou Aruna. Sa femme est plutôt du genre très actif, elle est quasi toujours dans la cuisine et elle s'inquiète beaucoup pour leur fils unique, Rehman, qui a choisi de lutter aux côtés des paysans opprimés, qui se voient dépouillés de leurs terres en vue de constructions de multinationales.
Car le pays est en pleine mutation, avec son choc des générations et des mentalités, et d’autres modèles venus d’autres pays (et notamment Etats-unis).
Les descriptions sont parfaitement dosées et nous immergent. Ainsi vivons-nous deux mariages, l’un musulman, l’autre brahmane.
Et que dire des nombreux aliments et mets qui parsèment les pages ? Cela met l’eau à la bouche et confère au récit une saveur particulière. Sont évoqués les mangues ( !), le biryani, les dosas, les parathas, les idlis, des umpa, avec même une recette de halva à la fin.
Le Bureau de Mariage de M. Ali a donc été une lecture distrayante mais aussi instructive, car je ne connais pas grand-chose de l’Inde, et c’est une bien bonne première approche.
Qu’en ont pensé Hilde, Myrtille et Isabelle ? Allons les lire !
Ce roman participe au Challenge d’Hilde « Les Étapes Indiennes » ainsi qu’au « Petit Bac 2020 » d’Enna pour ma 4e ligne, catégorie Amour.
Belles lectures et découvertes !
Blandine.