Le gourmet solitaire. Masayuki KUSUMI et Jirô TANIGUCHI – 2016 (Manga)
Publié le 18 Avril 2018
Le gourmet solitaire
Scénario de Masayuki KUSUMI
Dessins de Jirô TANIGUCHI
Postface de Masayuki KUSUMI
Traduit du japonais par Patrick HONNORÉ et Sahé CIBOT
Editions Casterman, collection « Écritures », mars 2016
200 pages
Thèmes : Japon, cuisine, découvertes, déambulation
Le gourmet solitaire du titre s’appelle Gorô Inokashira.
Il est célibataire, sans enfant, sans attaches, travaille dans l'import-export, voyage beaucoup, que ce soit dans la région de Tokyo, le Japon, l’étranger.
Nous le suivons dans dix-huit de ses déplacements, souvent après avoir conclu une affaire, ce qui le met particulièrement en appétit.
D’ailleurs, c’est un homme qui semble tout le temps avoir faim, quelque soit l’endroit, l’heure de la journée ou de la nuit.
Mais il sait rarement où aller manger.
Commence alors une déambulation dans les rues ou les allées de la supérette, guidée par l’envie de déguster tel ou tel plat, sa mémoire incertaine floutée par le passage du temps, l’aspect des devantures ou le monde devant la porte (qu'il fuit)…
A l’intérieur, son indécision demeure.
Et il se retrouve bien souvent avec toutes sortes de plats autour de lui, influencé par le patron, une conversation, une odeur…
Et que cela soit une affaire de caractère ou de politesse retenue toute nippone, c’est souvent trop !
Cette indécision pourrait être belle, contemplative si elle n’était pas celle du reflet de sa peur du regret.
Celui d’avoir mal choisi, que ce soit dans son assiette ou même dans sa vie, notamment amoureuse.
Mais je n’ai pas apprécié ce personnage qui me semble peu sympathique, pétri de jugements (sur les femmes, l’aspect d’un lieu ou d’une personne) et qui est plus gêné par le bruit occasionné par les reproches d’un patron à son employé chinois, qu’à la teneur des récriminations, teintées de racisme.
Les japonais aiment beaucoup les étrangers, et on vit très bien comme travailleur émigré au Japon… surtout si on n’est pas noir, pas chinois, pas coréen, pas une femme, pas homosexuel, pas asiatique, pas musulman et pas américain.
Même si ne mange quasi aucun des ingrédients/plats cités, et que je n’ai pas eu de faim subite, j’ai beaucoup aimé la présentation de l’ouvrage.
Chacune des aventures culinaires nous est présentée dans un chapitre, souvent introduit par quelques mots très intéressant pour nous expliquer le plat, la manière de le préparer, son histoire, ou celle du quartier.
Ginza : quartier du luxe et de l’élite culturelle et économique. Face à la concurrence d’autres quartiers depuis les années 1970-1980 comme centre attractif des nouvelles générations, et subissant plus fortement peut-être les contrecoups de la crise, son image est devenue rétro, voire un peu vieillotte, malgré les efforts des promoteurs et des groupes de marketing pour redorer son blason.
Ce manga nous permet ainsi de découvrir de nombreux quartiers de Tokyo, des plats, ingrédients, assaisonnements, cuissons, associations de plats ou saveurs et leurs origines, leurs prix, ou encore des convenances sociales.
Comme par exemple, le fait de boire de l’alcool (le protagoniste n’en consomme pas – ce qui est problématique en société et/ou lorsqu’il n’y a pas de riz de servi !), la position ou le lieu pour manger (dans le train ou sur la terrasse de grands magasins / seul, assis, sur les genoux ou au comptoir) ; la xénophobie ; les serveurs qui s’excusent de l’attente en apportant les plats…
Il s’achève sur un récit autobiographique de Masayuki Kusumi qui nous raconte l’une de ses pérégrinations culinaires ayant certainement conduit à la création de ce Gourmet Solitaire !
Cet ouvrage est paru en 1994 (2005 en France) et son succès ne se dément toujours pas. Que ce soit auprès des Japonais comme d’un public occidental toujours plus grand. Il est tel qu’il a été adapté en série télévisé, de 12 épisodes par saison (6e saison en 2017 !)
Une suite est parue, toujours chez Casterman, en 2016, intitulée Les Rêveries d’un Gourmet Solitaire.
Ce manga participe au RDV « BD de la semaine » qui se passe aujourd’hui chez Noukette (Retrouvez-y toutes les participations du jour - CLIC) ainsi qu’au challenge « Un mois au Japon » d’Hilde et Lou, et à celui de Bidib « Des Livres en cuisine ».
Découvrez aussi l’avis de Mo’ ; Hilde;