Motel Lorraine. Brigitte PILOTE - 2017

Publié le 26 Septembre 2017

Motel Lorraine

 

Brigitte PILOTE

Editions Michel Lafon, 7 septembre 2017

240 Pages

 

Thèmes : USA, Africains-Américains, esclavagisme, déracinement, rêves, Histoire, résilience, transmission, famille

 

Une couverture veloutée, des couleurs chaleureuses, un bandeau brillant, une fausse impression de girly, les Sixties-Seventies, une photo d’enseigne de motel, comme il y en a tant aux Etats-Unis, et une aube, comme un symbole de renaissance…

 

Je vous propose d’accompagner cet article des chansons qui parsèment ce roman.

Source - Clic

Le Motel Lorraine existe.

Il se situe à Memphis, dans le Tennessee.

Son histoire particulière lui a valu à la fois déchéance et célébrité.

Car c’est sur le balcon de sa chambre n°306 qu’a été assassiné Martin Luther King, le 4 avril 1968.

 

A partir de ce fait réel, dans une chronologie bouleversée entre 1965 et 2000, Brigitte Pilote entrelace plusieurs destinées, surtout féminines, venues d’horizons divers, toutes placées dans l’héritage du Révérend King, dont la parole et l’action non-violente entourent le récit.

 

Tous ces personnages ont un rêve ancré dans le cœur, tous espèrent un nouveau départ, qu’il soit pour eux-mêmes, pour leur famille, ou même pour leur ville : Memphis, presque le personnage principal. Memphis, tiraillée par ses luttes raciales intestines, issues de l’esclavagisme, de la culture du coton et du multiculturalisme.

Chaque facette de cette ville, ses quartiers, son âme, ses transformations, nous sont dévoilées par les différents personnages de ce récit, qu’ils y soient nés ou qu’ils l’aient adoptée.

 

1977, enfuies de Montréal, une mère et ses deux filles s'installent à Memphis dans la chambre 306 du Motel Lorraine. Cette même chambre dans laquelle fut assassiné Martin Luther King neuf ans plus tôt et qui n'a jamais pu être occupée depuis, faisant dépérir les affaires des propriétaires du motel.

Même à l’approche du Festival du Coton, personne n’aurait voulu s’y installer.

Autour d'elles, le récit se tisse.

 

Sonia est diseuse de bonne aventure et malade.

Louisiane, 16 ans, est une adolescente rebelle qui n'aime pas ses petits yeux et qui, par opposition à sa mère, a décidé de ne plus se nourrir. Tandis que Georgia, 11 ans, aime rire, danser, chanter et manger. Et elle est fascinée par sa sœur.

Au motel, les deux filles font la connaissance de Jacqueline Smith, la femme de chambre.

Elle est la sœur de Lonzie, un ancien taulard reconverti en photographe pour le compte de son ami Aaron Eagle, et qui croise la route de Louisiane.

Elle le suit, découvre la télévision, s’en abreuve, pose pour Lonzie.

Jacqueline, qui a reçu une très stricte éducation faite de labeurs, recommande Georgia à Grace De Priest, directrice de la chorale d'une petite église baptiste dirigée par le Pasteur Whitehead, et amoureuse des fleurs.

La petite se découvre un don et une amie, Alabama Ebony, soliste.

Tour à tour, en quelques lignes ou plusieurs pages, dans des chapitres mutliformes, avec ces personnages, brossés avec leurs qualités comme leurs défauts, qui revisitent leur (et le) passé et dont les prénoms possèdent une symbolique très forte (plusieurs sont des Etats sudistes esclavagistes), Brigitte Pilote explore le thème de la résilience.

Alors que Martin Luther King tombait sous les balles, chacun a vécu son propre 4 avril 1968.

Et à chacun de ressentir combien un deuil national devient quasi insignifiant quand le malheur ou les préoccupations frappent à sa porte…

Et comme il est difficile de s’extraire de la condition dans laquelle notre naissance nous enferme.

Malgré les admonestations paternelles, Lonzie avait refusé que sa vie fût dictée par le sifflet de l’usine ou les caprices des grands propriétaires terriens du compté, comme son père qui s’était épuisé à cultiver un petit lopin de terre et à nourrir du bétail qui ne lui appartiendraient jamais. De l’autre côté de l’océan, L’Afrique entière se réveillait, avait appris Lonzie. Il était grand temps que leurs frères d’Amérique en fassent autant.
Il s’était révolté très jeune à l’idée d’étouffer sans la cage fétide de la pauvreté au milieu d’un océan d’opulence. Dans sa « Lettre de la geôle de Birmingham », c’était en ces termes que Martin Luther King avait décrit la situation déplorable dans laquelle restait enlisée la grande majorité des vingt millions de Noirs américains, cent ans après l’abolition de l’esclavage.

Page 114

Ce roman, le deuxième de l’auteure mais premier publié en France, ne pouvait que me plaire de par sa construction polyphonique et ses thèmes croisés, qui m'ont permis d'apprendre beaucoup et de me sentir proche de ces personnages malgré quelques longueurs. Ils font écho à mes lectures, films ou séries TV du moment. (Et il y a même une référence à Sainte Blandine.)

 

 

Pour lire et découvrir d’autres ouvrages sur l’esclavage, quelques autres chroniques du blog :

 

Merci aux Editions Michel Lafon

Ce roman participe au Challenge de Sophie Hérisson « 1% Rentrée Littéraire 2017 » (6/6)

 

Belles lectures et découvertes,

Blandine.

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N
Un thème qui m'est très cher, merci pour le clin d'œil Blandine.<br /> Merci aussi pour les extraits musicaux qui mettent tout de suite dans l'ambiance (et puis Louis Armstrong <3)<br /> Je suis d'accord avec vous, ils subliment les romans.<br /> Celui-ci a l'air profond et émouvant, à vous lire en tout cas.<br /> Belle soirée à vous.
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B
Merci beaucoup Nancy <3<br /> Belle journée à vous!