Western girl. Anne PERCIN. (Dès 12 ans)
Publié le 20 Mai 2015
Western girl.
Anne PERCIN.
Editions du Rouergue, mars 2013.
Dès 12 ans.
Thèmes abordés : adolescence, musique, passion, chevaux, voyage, Etats-Unis, différences, racisme.
J'ai adoré cette lecture qui nous propulse dans le Middle West américain, au cœur d'un groupe de 12 frenchies, cinq garçons, sept filles, partis trois semaines en stage dans un ranch au milieu d'un élevage de races [de chevaux] américaines grâce au Journal De Bord, (JDB de son surnom !) d’Elise Bonnel, rousse flamboyante de 16 ans.
Ils se rendent dans le Dakota du Sud, dans la ville de Winner, comté de Tripp, où la famille Cooper les accueille. Il y a le père, la fille (Patricia dite Trish), le fils (Mark mais qui travaille plus loin dans la propriété avec sa femme, Anne.)
Les chevaux, les Indiens, la musique country, le look country girl Elise adore ça depuis ses 6 ans et son premier repas dans la chaîne de restaurants Buffalo Grill. Si le point de départ est ce qu’il est, elle a cependant développé toute une passion autour et se donne les moyens de pouvoir la vivre et réaliser ses projets. Elle se paie ses cours d’équitation et la plus grande partie de son matériel en faisant des petits boulots, mais pour ce voyage, c’est finalement ses parents qui le lui offrent. Ce cahier, elle se l’est acheté pour y noter ses impressions, sentiments et y laisser une trace réelle, concrète, de ce qu’elle s’apprête à vivre : son american dream !
Le groupe découvre une nouvelle façon de faire et de vivre, en accord avec la nature et bien sûr, les chevaux (morgan, pinto, quarter horse, appaloosa) et tout ce qu'il y a à faire autour d'eux : les soins, les corvées, les compétitions, et les différentes manières de faire par rapport à la France.
Un chaval appaloosa leopard - http://lunivers-des-animaux.e-monsite.com/pages/les-equides/l-appaloosa.html
Si Elise se représente assez bien la vie au ranch et ce que cela implique, elle a totalement occulté le facteur humain, et notamment en collectivité, elle qui est d’un tempérament plutôt solitaire. Et des surprises, la vie de groupe va lui en réserver ! Et ce, dès le départ avec la bavarde Georgia, qui aime à se faire remarquer, surtout du beau Louis Beauregard !
Inévitablement il se crée des affinités, voire amitiés, jalousies, moqueries, rivalités, et deux clans se dessinent bien vite. Pour les nommer, Elise se sert de l’histoire américaine et de la situation géographique du Dakota, un territoire de l’Union non annexé, abolitionniste. (Page 59)
Il y a donc les Con-Fédérés (6, voire 7 avec Louis) et ceux de l’Union dont elle fait partie.
Et les idées reçues vont bon train, de la part d’Elise, comme des autres, sur eux-mêmes ou les Américains…
Ils étaient morts de rire. Louis a fait : « Oh, s’il y a une église, ça doit être immense en effet ! » ; je voyais bien que c’était de l’ironie. C’est vrai que, si on considère qu’ils viennent presque tous de Paris, c’était un peu ridicule de ma part de prétendre habiter une ville. Pour les Parisiens, de toute façon, sorti de la capitale, tout est nul. Sauf en vacances, c’est autre chose : ils s’extasient sur la moindre patate en train de pourrir dans un champ…
Je me suis très bien représentée la chaleur ou les pluies torrentielles, les différentes odeurs du cheval, de la poussière, du bois, du foin et l'ambiance!
D'autant plus que la jeune fille cite films, séries télévisées ou éléments de culture populaire qui (nous) parlent forcément! Et la musique, comme un fil conducteur, la country qui l’accompagne ou la console, et nous immerge.
Jargon, expressions, argots, paroles ou titres de chansons parsèment le texte en italique. D’ailleurs, chaque titre de chapitre est une parole de chanson country américaine.
Et pour bien m’imprégner de l’ambiance, je me suis mise à écouter de la country ! Mon 5 ans m'a dit "Hey, c'est la musique de Martin!" (Comprendre de Martin dans Cars, le dessin animé de Disney): Take me in your lifeboat de Chris Hillman.
Cocoon, Jimmy Moriarty, Bob Dylan, Tom Waits, Ennio Morricone avec Il était une fois dans l'Ouest, blue bayou de Linda Ronstadt, Bellamy brothers et Let your love flow et l'incontournable Johnny Cash et sa femme June Carter pour Help me make it through the night! (A qui le roman est dédié avec Jane Austen)
Johnny Cash and June Carter Cash - Help Me Through The Night
Studio version of "Help Me Make It Through the Night."
Mix Of Country Part 1 by Leraix Dylan [Big Thanks 2 000 000 Views] Tracklist : [00:00] Alan Jackson - Chattahoochee [03:41] Alan Jackson - Country Boy [07:37] Bellamy Brothers - Old Hippie [11:36] ...
J'adore la musique à 33'11.
Le roman est très bien écrit et propose, en alternance avec les déboires relationnels (plutôt classiques) de la jeune fille, une description géographique, une analyse historique et sociologique des Etats-Unis.
Avec Elise, on découvre une Réserve, de hauts lieux de batailles, nous roulons sur les immenses Interstate, ces routes linéaires presque sans fin du centre des Etats-Unis, on écoute de la musique dans un snack diffusé par un juke-box où des mémés frappent des mains en cadence. En France, on les aurait prises pour deux gâteuses surexcitées en overdose de vitamines. Mais ici, ce genre d'attitude, ça passe : si on aime quelque chose, si on se sent bien, on le montre. Quel que soit son âge. C’est pareil pour les fringues : ici, ce qui compte, c’est d’être à l’aise. Cool. (Page 79)
On admire le mont Rushmore avec ses quatre têtes de présidents sculptées dans sa roche, les Badlands. Des roches grises rayées de rose, d’orange, découpées comme avec un ciseau cranteur, des balles de poussière et de brindilles qui roulent au ras du sol, des buissons rabougris – et personne à des miles à la ronde, personne à part nous, au bord de la route, tenus en respect par le paysage. (Page 73)
Elle nous dresse plusieurs portraits du Midwest, avec ses spectacles de rodéo (ça perpétue la tradition, et c’est ce qui a sauvé bien des cow-boys de la famine. Dans les années 1950, on a eu de moins en moins besoin d’eux, et ils ont survécu en organisant des spectacles. (p119), avec des cow-boys, les derniers « vrais » laissés-pour-compte qui, quand ils ne bossent pas dans les rodéos ou ranchs, touchent le welfare benefit (une allocation-chômage) et sont à peine mieux vus que des sans-abri (page 64).
Et la question du préjugé, de la différence (aimer la country pour une jeune fille française n'est pas courant), du racisme, est amenée par la présence de Derek B. Johnson, un jeune Noir venu de Philadelphie grâce à l’Urban Riding Club de Fletcher Street Philadelphia.
Fletcher Street Urban Riding Club
Fletcher Street's riding community has been a part of the Philadelphia community for over 100 years. For many of those years, Fletcher Street was part of a larger urban horse community that numbered
Une association qui existe réellement (et que l’on peut soutenir) depuis plus de cent ans. Dans ce quartier où se trouvaient des écuries, des Blancs y avaient abandonné des chevaux, qui ont été recueillis par d’anciens esclaves. Aujourd’hui, elle permet aux jeunes Noirs de n’être pas à traîner dans les rues et d’échapper aux gangs en s’occupant de chevaux dont ils prennent soin et montent dans diverses parades.
L’association a un programme qui leur donne l’occasion d’aller dans des ranchs apprendre le breeding (l’élevage) et même l’équitation western (pages 61-62) tout en recevant un salaire, sans frais de transport.
Elise et Derek, malgré des débuts difficiles, sympathisent et la jeune femme trouve en lui un soutien et même un ami lorsque survient l’incident avec la chanson (raciste) Sweet Home Alabama du groupe de rock sudiste Lynyrd Skynryd.
-I’m not a racist !
A ma grande surprise, Derek a éclaté de rire.
-I know that. Besides, you’re a redhead. You know a lot about discrimination.
Alors là, j’étais sciée. Se faire plaindre d’être rousse par un Noir sorti d’un ghetto, je ne m’y attendais pas…
Mais j’ai compris : d’après ce qu’il m’a dit, les roux en Amérique sont considérés, soit comme des attardés mentaux (à cause d’un soupçon de consanguinité parmi les immigrants irlandais, si j’ai bien compris), soit comme des agités du bocal au tempérament dangereux.
(…)
Je lui ai dit qu’en France, je n’avais jamais entendu dire ça (mais sans doute qu’on ne le disait pas devant moi). En revanche, on prétend que les roux portent malheur. Et qu’ils puent…
-Hmm… Body odor, I can tell you about that !
Même si j’ai trouvé quelques éléments dommages, comme une narration un peu trop autocentrée (les choses semblent toujours se faire pour ou contre Elise) et une fin un peu trop romanesque, j'ai vraiment été transportée!
Ce roman fait partie de la sélection pour le Prix des Incorruptibles, sélection 5e/4e, pour l’année scolaire 2014-2015. Je vous ai présenté d’autres livres sélectionnés pour ce Prix, pour cette année ou non, et d’autres catégories d’âge.
Depuis 26 ans, les Incorruptibles décernent un prix, par le biais des élèves à l’école/collège, à un album ou livre. Six livres sont mis en compétition selon un ou deux niveaux de classe. A tour de rôle, les élèves lisent et ramènent chez eux pour le lire en famille, ou simplement plus calmement. Parfois les parents sont même invités à voter pour leur livre préféré, comme ce fut le cas pour nous lorsque ma fille était en CP (2010-2011).
« Le prix littéraire des Incorruptibles a été conçu comme un jeu, un défi à relever. Son objectif est de changer le regard des jeunes lecteurs sur le livre, afin qu’ils le perçoivent comme un véritable objet de plaisir et de découverte. L’association a reçu en 2013 l'agrément de l'Éducation Nationale, en tant qu’association éducative complémentaire de l’enseignement public. »
Elisabeth Brami nous fait l'honneur d'être la nouvelle marraine du Prix des Incorruptibles. "Sous le signe du lien La littérature est un droit pour tous, et donner le meilleur d'elle aux enfants est
Cette année, la marraine des Incos est Elisabeth Brami.
Elise ne vit que pour le western : équitation, musique country dans les oreilles, danse country, vêtements style cow girl... Quand ses parents lui offrent un stage de 3 semaines dans un ranch du ...
http://ennalit.canalblog.com/archives/2015/04/04/31831223.html
L'avis d'Enna: "J'ai bien aimé ce roman qui apporte pas mal d'informations sur l'histoire et la culture de l'ouest américain. Par contre, je dois avouer que le personnage d'Elise m'a un peu exaspérée (plus parfois que les "méchants") à cause de son côté "mieux que tous" donc je ne me suis pas attachée à elle."