La Barbe-bleue. Charles Perrault et Dedieu (dès 6 ans)
Publié le 31 Mars 2014
La Barbe-bleue
Dedieu, d’après Charles Perrault.
Editions du Seuil Jeunesse, septembre 2005.
Dès 6 ans.
Notions abordées : mariage, curiosité, différences, mystère.
Après avoir lu plusieurs versions du conte de Charles Perrault sous forme d’albums ici et là, un roman et un essai, j’ai trouvé cet autre album à la bibliothèque.
Une nouvelle version du conte La Barbe-bleue (ici, La a été conservé) dont le texte a été modifié. Non dans le souci de l’actualiser, mais plus de se l’approprier, car les tournures de phrases n’en sont pas forcément simplifiées.
Un petit rappel de l’histoire, où j’ajoute au fur et à mesure, les petites ou grandes différences d’avec le texte original. Comme chez Charles Perrault, l’homme n’a pas de nom et est désigné par son seul attribut visible, étrange et repoussant : sa barbe bleue.
Riche, mais seul, sa mauvaise réputation est due à sa fortune mais surtout à ses mystérieux veuvages. Chacune de ses épouses disparaît sans laisser de traces, ni corps, ni sépulture.
Il arrive tout de même à conquérir la fille d’une de ses voisines. Un mois après le mariage, il lui annonce qu’il doit partir pour un voyage d’affaires et lui laisse les clés de la maison. Ici l’écrit et le visuel s’opposent. Sur l’illustration, on le voit tendant, de dos, le trousseau vers sa femme, presque à regret. Alors que dans le texte, il part, certes assez promptement, mais surtout après l’avoir embrassée. Chose que je n‘avais jamais lue jusqu’à présent !
Laissée seule, la jeune épouse parcourt les différentes pièces et découvre tous les trésors qu’elles renferment, malgré l’impatience qui la tenaille. Un dernier instant d’hésitation, la clé tourne et la vision des anciennes femmes de son mari l’assaille, petit à petit.
Dans cette version, pas d’invités arrivés dès le départ de Barbe-bleue et une curiosité un peu plus maîtrisée, mais point surmontée ! La clé sournoise est teintée de sang, et la jeune femme la rend avec les autres à son mari, en prétextant ne pas en connaître l’origine, ce qui est un peu vrai ! Mais elle ne feint pas de l’avoir perdue. Il lui qu’il lui « faut mourir », mais lui accorde « un demi-quart d’heure » pour prier Dieu, alors que dans la version originale, c’est elle qui le réclame.
Elle monte à la tour, demande à sa sœur Anne, inconnue jusqu’alors, de voir si leurs frères sont sur le point d’arriver. Redescendue entre temps, empoignée par les cheveux par Barbe-Bleue, et dévêtue, tout au moins du haut, le couteau commence son office.
Les deux frères arrivent in extremis pour la sauver, en tuant Barbe-Bleue de leurs deux épées, l’un de face, l’autre de dos.
Barbe-bleue mort, la jeune femme se remet plutôt vite ! Le conte se clôt en trois lignes qui forment une seule phrase. Elle convole rapidement en secondes noces avec un homme décrit comme honnête et dont on devine, qu’ils sont amoureux l’un de l’autre, après avoir certainement commis l'adultère!
Ici, les moralités que Charles Perrault aimait à mettre pour clore ses contes, sont absentes.
Plus je lis cette histoire, et plus elle me plaît. Ou plutôt, le traitement qui en est fait : les petits changements, dans le texte et surtout dans les illustrations. Chacune met l’accent sur un ou plusieurs détails : l’aspect corporel de Barbe-Bleue, son attitude ou celle de sa jeune femme, alors que d’autres détails restent à l’identique. Dans toutes les versions, Barbe-Bleue est un homme à la carrure impressionnante : grand, carré, hautain, il est ici aussi gros que sa femme est fine (c’est une constante). La barbe est fournie, bouclée et assez longue. Il est beaucoup représenté, la tête en arrière et la bouche ouverte, lui conférant une tête animale, la barbe devenant crinière. Oui, ce Barbe-bleue là est bestial !
Les illustrations semblent être un mélange de collages, de silhouettes, d’ombres et de pochoirs. Aucun visage n’est représenté, hormis ceux des squelettes, donc aucun œil, ce qui correspond à l’ambiance du compte où les choses doivent restées cachées, invisibles. Seuls les squelettes des femmes disparues semblent nous voir et nous prendre à témoin. Les couleurs sont sobres, du beige, du marron, du rouge et un peu de bleu., donc!
Une version similaire du conte, et pourtant bien différente, qu’il est intéressant de comparer !
Belles lectures et découvertes !
Blandine.
Album lu dans le cadre du Challenge « Je lis aussi des albums » de Sophie Hérisson.