Décrire la Guerre. 14-18.

Publié le 16 Novembre 2013

Décrire la Guerre. 14-18.

CEUX DE 14.

LES ECRIVAINS DANS LA GRANDE GUERRE.

Le Figaro Hors-série, juin 2013.

Ce magazine se lit comme un livre, comme les livres qu’il livre !

Sont réunis les écrivains qui ont écrit sur et décrit la Grande Guerre, pendant et après le conflit.

Tous ces écrivains et poètes ont tenté de la décrire, en tant que telle, dans sa réalité, dans ses actes, mais également dans son essence. Sans pour autant arriver à l’expliquer ou à la comprendre dans son entièreté.

Cette guerre est encore parmi nous, dans les replis, plus ou moins secrets, de nos familles. Certains racontent les souvenirs transmis, d’autres pansent les blessures des non-dits, ou des absences… En France, on comptabilise près de 1,4 millions de morts (pendant la guerre ou des suites de leurs blessures après l’armistice) et disparus !

Ces dernières n’ont pas été seulement physiques, ou visibles, comme celles des « gueules cassées » (6,5 millions d’hommes). La médecine de l’époque ne savait pas encore appréhender les blessures psychologiques, invisibles à l’œil, mais autrement plus meurtrières…

Ces traumatismes ont non seulement impacté toute la génération des Poilus. Mais également leur descendance, et ce, jusqu’à nous…

Aujourd’hui, la mémoire vivante de la Grande Guerre n’est plus. Le dernier Poilu français, Lazare Ponticelli, s’est éteint le 12 mars 2008, à l’âge de 110 ans.

Le dernier combattant, décédé le 27 février2011, s’appelait Claude Choules et était britannique.

Cette guerre constitue un moment charnier ( !) pour le monde et est la première que l’on puisse qualifier de totale. Elle a englobé toutes les populations, toutes les couches sociales et tous les aspects de la vie. Ce fut une guerre humaine, militaire, politique, industrielle et commerciale.

La loi du 25 mai 1913 étend à trois ans la durée du service militaire et désormais tous y participent, au nom du principe d’égalité ! Finis les privilèges pour les enseignants ou les prêtres !

Déjà pendant les combats, la guerre a fait couler beaucoup d’encre, celle des médias d’abord qui, soumis à la censure, devaient combattre la puissante propagande allemande qui risquait de miner le moral du pays, tant au Front qu’à l’Arrière. Ils devaient aussi entretenir la flamme patriotique, en cachant ou en enjolivant la réalité.

Les écrivains, poèmes et carnets de guerre ont commencé à être publiés dès le début de la guerre. Tantôt pour raconter le quotidien, les horreurs, tantôt pour dénoncer des décisions absurdes, des morts inutiles et toujours plus nombreuses, et anonymes.

Car là réside le grand paradoxe de cette guerre ! Le nombre d’hommes engagés dans cette guerre est extraordinairement élevé (plus de 60 millions d’hommes), mais à l’inverse des conflits précédents, les hommes ne savent pas s’ils tuent… Les formidables avancées technologiques et industrielles ont permis de mettre au point des armes de guerre terriblement puissantes, capables de pulvériser à des kilomètres un paysage, et ce qu’il comporte : arbres, végétations, bâtiments, et donc hommes… Les photos aériennes faites aujourd’hui nous prouvent que ces stigmates en sont pas prêts de disparaître !

Le glorieux combat au corps à corps qui fait honneur n’est plus ! Le temps des baïonnettes au canon et des charges de cavalerie est révolu… Et pourtant… Malgré ces incohérences évidentes, ce sera toujours réalité durant toute la guerre, et même au début de la Deuxième Guerre Mondiale, en 1939-1940.

Ce Figaro hors-série passe en revue les différents écrivains/poètes de la Grande Guerre. Il nous parle d’abord de ceux qui ont fait la guerre, qui l’ont sentie, vécue, ressentie de l’intérieur.

Après nous avoir montré plusieurs photographies (en couleurs) des Poilus ou populations à l’Arrière, chacune agrémentée d’un extrait d’une œuvre, le magazine nous dresse le portrait de 12 écrivains de la guerre, sur un plan chronologique, qui l’ont faite, juste effleurée, où qui à l’inverse y succombèrent. Tels Charles Péguy, Henri Fournier, Maurice Barrès, Apollinaire…

Une présentation de Maurice Genevoix (Ceux de 14),

Viennent ensuite des présentations en duo, soit pour les opposer, soit pour les renforcer.

Pour exemple, Roland Dorgelès (Les Croix de Bois) et Henri Barbusse (Le Feu), les britanniques Rudyard Kipling et G.K. Chesterton, ou encore les Allemands Ernst Jünger (Orages d’acier) et Erich Maria Remarque (A l’ouest, rien de nouveau).

Ernst Jünger est presque froid, méthodique, carré. Il traite de toute la guerre, décrit méticuleusement les lieux, les armes utilisées, les bruits, les soldats et leurs réactions diverses. La bataille des Eparges en avril 1915 est très longuement évoquée.

Il a aussi écrit Le boqueteau 125 sur cette bataille en particulier, puis Feu et sang, qui est une mise en abîme du boqueteau 125.

A l’inverse, Remarque parle d’une compagnie. Des sentiments humains, héroïques ou vils, des hommes réduits parfois, souvent à l’état de bêtes.

Il ne donne pas de noms de lieux ou d’indications temporelles, que ce soit ici ou ailleurs, lui ou un autre, quelle différence après tout ?

La fin du magazine nous offre plusieurs listes d’ouvrages à lire selon différents angles de vue (combattants, officiers, de toutes nationalités et coloniaux, ). Il est important de rappeler à quel point cette guerre fut mondiale, car du fait des alliances et des empires coloniaux, des millions d’hommes furent impliqués dans ce conflit. Les « indigènes » payèrent très cher en nombre de vies cet engagement, et la reconnaissance nationale à leur égard est très récente.

Il est cependant dommage qu’il n’y ait pas de références jeunesse car si on veut que la mémoire perdure, il est nécessaire de l’enseigner aux plus jeunes. Pour entretenir ce que les politiques appellent « le devoir de mémoire ». Appellation que je n’aime pas car il induit une obligation. Même s’il est vrai que peu savent aujourd’hui pourquoi le 11 novembre est un jour férié !

Décrire la Guerre. 14-18.

Je n’ai malheureusement pas lu tous les livres évoqués dans le magazine.

Pour le moment, ceux que j’ai lu sont à la cave (avec la plupart de mes autres livres d’ailleurs) pour raison de travaux…

  • Outre Ernst Jünger que j’ai maintes fois relu, et Erich Maria Remarque, j’ai tenté de lire Les Croix de Bois de Dorgelès, mais n’y suis pas arrivée. Il faudra y remédier !
  • J’ai aussi lu Cris, de Laurent Gaudé. C’est son premier livre, et il réussit un tour de force. Le livre est extrêmement difficile en termes d’émotions.

Il parle d’un combattant, abandonné sur le no man’s land (l’espace entre deux tranchées ennemies), appelé « homme-cochon » et qui pousse des cris et hurlements de bête mais à consonance humaine…

Ces cris, j’avais le sentiment de les entendre pour de vrai et j’en ai fait plusieurs cauchemars… J’évite de trop y penser aujourd’hui encore !

  • Avec Les enfants de la Patrie, Pierre Miquel nous fait revivre en quatre tomes la Grande Guerre par le biais d’une famille où les quatre garçons s’en vont les uns après les autres au Front… d’où tous ne reviendront pas…

Toute la guerre est décrite, dans ses petits et grands moments, la peur, la déchéance humaine, les petites victoires sont évoquées, les blessures et les morts… Poignant, émouvant, mordant…

  • Jacques Tardi a dessiné la Grande Guerre en partenariat avec l’historien Jean-Pierre Verney, dans la BD Putain de Guerre, en deux tomes. On suit un jeune homme mobilisé, pas encore sur le front, mais déjà rempli de désillusions et comme mort…

Œuvre de fiction, elle fournit aussi des reproductions de vrais documents.

Un CD accompagne le deuxième tome, qui explique la genèse du projet de Tardi, avec des images d’archives et son ressenti personnel et familial. Poignant !

  • De nombreux films ont comme sujet la Première Guerre Mondiale. Elle ne cesse de nous questionner, de nous interroger, de nous hanter, pour certains. Comme pour Stéphane Audoin-Rouzeau, historien de la Grande Guerre et qui vient de publier les raisons de son intérêt vital pour ce conflit. Interview à lire dans le Figaro Littéraire du 7 novembre 2013.

Ces films traitent de la guerre dans son ensemble, ou bien de moments ou personnes particuliers, La chambre des officiers (inspiré du livre de Marc Dugain du même nom), ou Joyeux Noël avec Guillaume Canet.

Ou bien prennent la guerre comme fond narratif, en l’évoquant indirectement car centré sur Arrière : Les âmes grises de Claudel ou Un long dimanche de fiançailles de Jean-Pierre Jeunet.

  • La remise du Prix Goncourt, le 4 novembre 2013, à Pierre Lemaître pour Au revoir là-haut, et dont j’ai pu lire un extrait dans le magazine Lire de cet été, témoigne de la force qu’exerce encore sur nous ce conflit !

Souvenez-vous !

Blandine.

Décrire la Guerre. 14-18.

Rédigé par Blandine

Publié dans #Histoire, #Magazines, #Première Guerre Mondiale, #Mémoire

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